Fabrice Luchini : "c’est le génie de Muray de nous expliquer qu’en réalité la culture qui est le miracle où chacun étant renvoyé à lui-même dans sa solitude, dans son rapport à lui, dans sa construction à lui-même, est confisqué, selon Muray, en faveur d’une globalité massive qui réduit l’Art dans ce qu’il a d’inéluctable pour en faire un matériau de consommation, de loisir ignoble, dans lequel il n’y a plus la vérité de la vie, il n’y a plus qu’un outil. C’est là où c’est totalement dément, presque un outil de domestication des masses ! Va dire ça à des ministres de la culture socialistes ou de droite, ils te prennent pour un dingue !"
Retranscription intégrale de l'émission de Finkielkraut du 24 O4 2010 avec Fabrice Luchini sur Philippe Muray ici. Vous allez me dire : c'est quoi ce travail débile d'écrire au lieu d'écouter? Surtout que ça demande un temps incroyable! Et puis on perd toute la saveur du ton, des voix...J'en sais rien, à quoi ça sert. Je fais pleins de trucs qui ne servent à rien. J'ai fait des enfants, par exemple. ça sert à rien. Je fais des barbecues plutôt que de cuire ma viande dans une poêle aussi, c'est idiot. Je parle toute seule. Débile.
Bref : en écoutant, en relisant, j'assimile mieux. Je mémorise. Voilà. C'est tout. Si vous trouvez d'autres raisons, vous les ajouterez. S'il n'y en a pas, vous conclurez sur l'absurdité humaine en général et féminine en particulier et vous dormirez rassuré d'être aussi futé dans ce monde de fous.
* Le titre est une allusion à un ouvrage de Stefan Zweig.
PS : écouter et voir chez Didier Goux l'émission de France 5 sur Alain Finkielkraut.
Merci beaucoup.
RépondreSupprimerRassurez-vous, ce n'est pas inutile, mais il y aurait trop à dire sur ce sujet et j'ai justement la flemme de dactylographier en ce moment.
RépondreSupprimerCela va même devenir de plus en plus utile voyant la façon dont les jeunes écrivent et donc comprennent. Met est jeux besoin dent d'ire plus ?
Très beau livre de Zweig... cela étant dit...
RépondreSupprimerÀ propos de Finkielkraut, le portrait que lui a consacré France 5 est vraiment très bien. Si je ne me suis pas planté dans les manip, l'émission sera en lien chez moi à partir de demain matin.
RépondreSupprimerMerci Didier, j'irai chez vous avec intérêt et grand plaisir!
RépondreSupprimerNebo : je ne vous remercierai jamais assez de m'avoir indiqué cet ouvrage de Zweig.
RépondreSupprimerJazzman, à force d'écouter et de réécouter, j'ai mieux perçu la tension entre les deux hommes (aussi amicale que soit la confrontation), ce sont vraiment deux visions qui s'affrontent, l'une d'elle, très noire et désespérée, de Luchini : "C’est fini, Alain, vos combats vous devriez maintenant les mettre à la lumière de Cioran, indifférence, la phrase de Flaubert : « Qu’ils disent du mal de moi derrière seulement, mon cul vous contemple… » Il y a chez Finkielkraut un espoir… Il n’y a aucun espoir ! La machine de communication sera la plus forte, le nombre sera le plus fort, l’Empire du Bien va gagner, la puissance de la démagogie, les chinois vont débarquer, c’est la fin de tout !"
Évidemment dit avec humour, n'est-ce pas, on rit avec Luchini mais c'est un rire, à certains moments, qui m'a glacée, à dire vrai. (Bon, à force d'écouter aussi le "c'est fini!")
Et de l'autre, Finkielkraut qui dit presque dans un cri! en citant une phrase de Muray : "Elle est très belle, et moi toute ma vie, ma pensée et ma vie, si j’ose m’exprimer avec cette emphase un peu ridicule, proteste contre cette phrase, je me refuserais toujours à lui laisser le dernier mot, mais je la trouve absolument extraordinaire" et aussi : " Quelle va être ma voix, ma voix va t-elle se joindre au chœur, vais-je être partie prenante de cette voix de harpie de la culture ?…[FL : mais elle va être récupérée Alain] Mais je n’en sais rien ! Récupérée peut-être mais je voudrais qu’elle fasse entendre, c’est cela mon propos, mon obsession quand je parle et quand j’écris un autre son de cloche. Après, la récupération peut-être, l’adhésion sûrement pas."
"L'adhésion sûrement pas!" Vous entendez Jazzman? Après la béquille entre crochets de Luchini, "mais elle va être récupérée Alain", on se dit, Finky est à terre,on a senti toute l'angoisse de son interrogation, que va devenir sa voix, sera t-elle autre que celle de la masse indifférenciée?
Et bien non!Il se redresse, il se retourne, par terre, et lui envoie son pied dans les jambes de Luchini! Par son : "adhésion sûrement pas! " Quelle magnifique retournement!
Voyez-vous, quand j'écoutais et j'écrivais cette émission, c'était deux combattants que je voyais devant moi et je comptais les coups gagnants. Mais c'était difficile, car les deux étaient très bons et ils usaient d'armes fort efficaces (Cioran, Muray, Malraux etc...)
Luchini a fort bien perçu le point fort de Finkielkraut : "Un jour on fera… mais il faudrait que vous ayez une vanité plus grande…"
Cette humilité de Finkielkraut, unie à une honnêteté intellectuelle hors-norme, oui, Luchini savait que la partie allait être difficile.
Et puis bien sûr, l'estocade finale, l'arme secrète de Finky : "Je ne suis pas optimiste mais j'ai un enfant." Luchini a bien tenté de citer une phrase enragée de Cioran : "« Si j’avais un enfant, ma présence, ma connaissance intuitive de l’avenir est telle que je l’étranglerais à la minute. », c'était trop tard, le coup de Finkielkraut était assené et imparable. Merveilleuse émission!!
Luchini dit à un moment donné que cette émission ne remplace pas le théâtre mais j'ai comme eu le sentiment qu'une pièce se jouait, et elle était importante, cette pièce, elle avait quelque chose de vital. Voilà.
Je confirme que le portrait de Finky que lui a consacré la 5, samedi soir dernier, est de qualité.
RépondreSupprimerOn ne "fait" pas des enfants.
RépondreSupprimerOn les accueille.
Mère : si vous voulez.
RépondreSupprimerChère crevette, en lisant votre réponse je réalise que les choses sont encore plus compliquées que je ne pensais, car je réalise que je n'ai même pas vraiment compris ce que j'entendais, justement parce que je suis trop charmé par la musique de Luchini.
RépondreSupprimerCe que je voulais dire, c'est que le texte écrit permet de s'en abstraire, surtout dans ce dialogue parce que je trouve qu'il en fait un peu trop à mon goût.
Et d'autres choses encore, mais ce sera pour une autre fois...
Oui, oui, moi aussi la première fois que j'ai écouté je trouvais Luchini merveilleux et surtout "bon enfant", drôle, brillant bien sûr etc...mais, à force de revenir en arrière, à force d'entendre vraiment, je me suis dit que Luchini (involontairement! Ne voyez là aucune connotation moralisante!)était en opposition directe avec Finky, que le débat, ses enjeux, les dépassaient tous deux, infiniment!
RépondreSupprimerIl y a cette phrase, par Luchini, cette citation de Muray évoquant Malraux :
"l’Art, qu’il soit littéraire ou plastique, n’exprimait jamais rien d’autre, à ses yeux, que l’idée que la partie n’est jamais et n’est pas jouée."
Voilà, Finkielkraut, l'intellectuel, le philosophe, représente cet espoir d'une partie qui n'est pas jouée, même si tout paraît foutu.
Oui merci pour la transcription.
RépondreSupprimerpourquoi vouloir une utilité dans cette retranscription? elle nous invite à la réflexion et à la distraction. voilà 2 missions que vous avez magnifiquement accomplies.
RépondreSupprimermerci.
Merci bcp pour cette transcription. Je cherchais le texte précis de Murray sur Malraux. D'une acuité et d'une lucidité profondes. Je vous en suis reconnaissant.
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