mardi 28 janvier 2014

Quand notre état-dictature tombe le masque





Décidée à me rendre à la manifestation dite "Jour de Colère" le 26 Janvier pour des raisons précises : certes les raisons de manifester sont assez hétéroclites ce jour-là, ça va des catholiques intégristes à quelques membres de la manif pour tous  en passant par les bonnets rouges bretons et les entrepreneurs furieux d'être taxés jusqu'à la disparition de leurs entreprises.Mais cette population disparate dans laquelle je ne me retrouve guère -disons : je ne pourrais adhérer à 100% à l'une des causes en particulier- a l'idée assez innovante de provoquer des alliances momentanées (selon l'expression d'un ami) et je trouve cela particulièrement judicieux : il ne s'agit pas de former un nouveau gouvernement dans l'immédiat mais de dénoncer, en manifestant (ce qui est le propre d'une manifestation) la restriction de nos libertés fondamentales de plus en plus grande : liberté de propriété privée, liberté d'éduquer ses enfants comme on l'entend nous les parents et pas selon des critères socialistes, liberté d'expression, liberté d'entreprendre sans rendre compte (financièrement ou juridiquement) à un Etat omnipotent, liberté d'avoir des relations privées comme on veut avec qui on veut sans que l'Etat légalise, liberté de s'assurer de façon individuelle avec une sécurité sociale privée et pas de payer pour l’Alzheimer du voisin ou l'avortement de la voisine alors qu'on a déjà nos propres enfants à protéger. J'oubliais que dans les associations qui défilaient il y avait le fameux "Hollande dégage" qui me convient assez.

H16 dans un récent article a montré son scepticisme quant à l'évolution vraiment efficace de telles manifestations hétérogènes mais une manifestation est à mon sens qu'un début, une étape nécessaire pour (re) connaître ses partenaires, bref, il ne s'agit pas d'avoir tous les mêmes idées (dans la vie ça n'est jamais comme cela qu'on fonctionne, ça c'est l'utopie socialiste) mais de contractualiser un partenariat autour d'une cause commune (dénonciation d'un état-dictature pour faire simple), partenariat limité dans le temps et dans la finalité. C'est tout. Quand j'achète mon pain à ma boulangère, je ne lui demande pas si elle est catho et pour le mariage gay, mais je lui achète son pain. C'est un peu le principe de cette manifestation; on se retrouve pour un temps limité dans l'espace et dans le temps, pour une dénonciation qui me paraît nécessaire.
J'y retrouve d'ailleurs, assez surprise, des membres de ma paroisse de campagne, tous bons pères de famille.

Je travaille depuis quelques années dans le milieu associatif et souvent nous recevons des incitations de nos sympathisants à fédérer toutes les associations qui existent pour exercer un réel contre-pouvoir face à un état omnipotent : ceci peut se faire de façon très ponctuelle me semble-t-il, comme dans Jour de Colère, mais pas de façon durable sinon on en reviendrait à faire de l'uniformité égalitaire socialiste qui est justement ce que nous voulons éviter à tout prix. Plus il y a de diversité d'opinions, d'actions, mieux c'est. La vérité est comme un diamant à multiples facettes, chacun doit trouver la sienne et sa façon de l'observer et de se l'approprier selon son propre prisme. Mon mari travaille auprès de jeunes et son meilleur mode d'action est la formation intellectuelle. Il a à cœur d'y engager tout son esprit, son énergie, sa passion de la vérité. C'est essentiel pour combler cette part d'incertitude dont parle H16 qui suivrait le relèvement d'un pays dans ses ruines. Quant à moi, je suis plus douée pour marcher et manifester.

Me voilà donc en marche sous une pluie battante, à photographier les divers groupes qui défilent dans une bonne ambiance énergique, déterminée et sympathique. Le temps est affreux nous sommes trempés comme des soupes et congelés comme mon poisson pané. Je défile avec un bon ami "Ilysien" et deux de mes enfants, mon aîné majeur et son frère mineur marchent avec des amis, je les croise de temps à autre.
Vers 16h je me dirige vers la gare Montparnasse et enjoins par téléphone au plus jeune de mes fils de rentrer en train avec moi : il doit repartir pour sa pension. L'aîné à qui j'envoie quelques sms m'explique que son propre train pour la province est à 20h, il peut aller jusqu'au bout. Je lui recommande de bien se disperser dès la fin de la manifestation, prise d'une intuition (appuyée par les dernières manifestations). Il me rassure par téléphone, il n'a aucune envie de terminer en garde à vue, il a des examens importants dans les jours qui viennent.

Je rentre tranquillement, écoute la télévision, m'aperçois que le hand ball et Valérie occupent tout l'espace médiatique français. Vers 19h, coup de fil de mon aîné : "nous sommes coincés par les crs , impossible de repartir, il est probable qu'ils nous embarquent en garde à vue parce que nous voyons des fourgons arriver. Ils ont tout prévu." Je lui enjoins de montrer son billet de train à un crs pour prouver sa bonne foi mais il m'explique que rien que le fait de s'approcher d'un crs est l'objet d'un passage à tabac et d'un embarquement immédiat par des "agents" en civil très violents. Sa batterie rend l'âme, plus de nouvelles. L'angoisse monte, je ne dors pas.

Le lendemain, je passe mon après-midi à appeler tous les commissariats d'arrondissement de Paris pour savoir où est mon fils : comme il est majeur, les officiers de police n'ont pas à me répondre (J. doit normalement appeler quelqu'un, il a droit à un coup de fil mais il m'expliquera qu'il a eu la vraie possibilité de donner ce coup de fil vers 14h alors qu'il a été libéré vers 17h donc ça ne servait à rien selon lui) mais ils le font tous très volontiers en consultant leurs listes, sauf le commissariat du 13ème, place d'Italie et du 18ème, rue de l'Evangile.

Je finis par savoir qu'il est gardé dans le commissariat du 16ème arrondissement et qu'il doit être libéré dans l'heure qui suit. Soulagement intense.

Une fois rentré, J. nous explique que le piège à gardes à vue a été rondement mené : à 18h, dernier discours, mon fils commence par avancer nonchalamment avec des amis vers l'avenue de Breteuil, il n'est pas pressé, son train est à 20h mais il se fait alors refouler par des crs qui installent leurs barrières et leurs disent de trouver une autre sortie. Ils font donc demi-tour, pas inquiets spécialement, et obtiennent la même réponse avec les mêmes barrages aux deux autres sorties de la Place Vauban. Ils sont coincés, et reculent dans les gaz lacrymogène lancés généreusement par les crs, observent des "agents" en civil qui se rapprochent d'eux, les filment et lorsqu'un manifestant tente de s'approcher des crs pour demander à sortir et à partir, le tabassage est immédiat et très violent. Dans la fumée, les gaz, mon fils est paniqué et assiste à des scènes de violence surréalistes, il se retrouve avec de bons pères de famille séparés de leur femme et enfants et voit quelques petites jeunes filles perdues, en pleurs. Quelques manifestants attrapent des barrières qu'on leur a préalablement lancées pour riposter contre le gazage des crs. Il est à peine 18h30...

La provocation est donc largement avérée du côté des crs.

A 23h, après quelques heures de silence absolu du côté des forces de l'ordre, J. se fait embarquer avec un groupe dans un fourgon plein de pisse et de merde et part pour un dépôt, derrière des barbelés aux portes de Paris. On lui notifie sa garde à vue à 1h du matin seulement. Pour quel motif? "Attroupement armé contre des forces de l'ordre"... On croit rêver.

A 3h du matin il est débarqué dans le commissariat du 16ème arrondissement et mis à 7 dans une cellule de 5m carrés. Les officiers hallucinent de tomber sur des jeunes et des pères de famille qui n'ont rien à faire là visiblement. A midi simplement ils mangent  un biscuit et boivent un jus d'orange. Puis ils reçoivent la visite de leur avocat commis d'office qui leur détaille tous les vices de procédure auxquels ils ont eu droit...

A 17h on les fait sortir un par un, demi-heure par demi-heure.

Voilà comment une manifestation témoigne par elle-même de notre état-dictature. On a le sentiment que notre gouvernement fait tout pour que nous passions à l'étape "ukrainienne" qui n'est rien d'autre, au vu de ce qu'ont subi les 250 gav arbitraires et de ces restrictions de liberté, que de la légitime défense la plus urgente et nécessaire aujourd'hui.




http://youtu.be/3HbOkcfdwbA












3 commentaires:

  1. Merci de votre témoignage qui est bien conforme à la réalité.
    J'ai moi même réussi a passer les CRS puis tenté vainement de sommer les forces de l'ordre de cesser leurs provocations et de laisser les manifestants s'en aller dans le calme.
    En ce qui concerne la Gendarmerie le rappel des valeurs militaires, de la Loi, de l'honneur et de tous nos ancêtres morts pour la France sont restés sans effets !

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  2. Robert Marchenoir29 janvier 2014 à 17:42

    C'est bien dans la ligne de ce gouvernement : sournois, tordu, mesquin, hypocrite et cruel. La tyrannie à visage humain.

    Néron faisait des vers, Hollande fait des petites blagues à Ankara pendant qu'il emprisonne nos enfants à Paris. La presse a tenu à nous le faire savoir. Il a retrouvé sa bonne humeur.On est bien contents pour lui.

    http://www.francetvinfo.fr/politique/vie-privee-de-hollande/hollande-fait-des-blagues-en-turquie_516395.html

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  3. vous n'êtes pas le premier a raconter les faits , mais c'est extemement important que les participants témoignent pour ceux qui restent chez eux pour cause d'âge de santé ou d'éloignement .
    je vous dis merci car avec ce qu'en disent les autres blogueurs presents , je vois a quel point l'état soutenu par la presse se fout de nous .
    quand a la police n'en parlons pas ils ne sont donc plus des citoyens nos flics? sont ils prêts demain a faire monter les gens dans des "wagons plombés"?
    amitiés

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