samedi 26 novembre 2011

Une histoire de guerre véridique

Un soldat au Vietnam voit un de ses compagnon mourir. Il écrit une lettre assez lyrique à la petite amie du soldat mort pour lui raconter sa fin."Et alors que se passe-t-il? Rat poste la lettre, il attend deux mois. La connasse ne répond jamais."


"Une histoire de guerre véridique n'est jamais morale. Elle n'est pas instructive, elle n'encourage pas la vertu, elle ne suggère pas de comportement humaniste idéal, elle n'empêche pas les hommes de continuer à faire ce que les hommes ont toujours fait. Si une histoire vous paraît morale, n'y croyez pas. Si, à la fin d'une histoire de guerre, vous vous sentez ragaillardi, ou si vous avez l'impression qu'une parcelle de rectitude a été sauvée d'un immense gaspillage, c'est que vous êtes la victime d'un très vieux et horrible mensonge. La rectitude n'existe pas. La vertu non plus. La première règle, me semble-t-il, est qu'on peut juger de la vérité d'une histoire de guerre d'après son degré d'allégeance absolue et inconditionnelle à l'obscénité et au mal. Ecoutez Rat Kiley. Connasse, dit-il. Il ne dit pas putain. Il ne dit certainement pas femme, ou fille. Il dit connasse. Puis il crache et regarde fixement ailleurs. Il a dix neuf ans -c'en est trop pour lui- et c'est pour ça qu'il vous regarde avec ses grands yeux tristes et doux de tueur et qu'il dit connasse, parce que son ami est mort, et parce qu'il s'est produit cette chose incroyablement triste et vraie : elle ne lui a jamais répondu.
Vous pouvez dire qu'une histoire de guerre est véridique si elle vous met mal à l'aise. Si vous n'appréciez pas les obscénités, vous n'appréciez pas la vérité; si vous n'appréciez pas la vérité, faites attention comment vous votez. Si vous envoyez des gars à la guerre, ils reviendront chez eux en disant des gros mots.
Ecoutez Rat :
- Nom de Dieu, mec, j'écris cette magnifique putain de lettre, je me fais chier, et qu'est-ce qui se passe? Cette connasse ne répond pas."

(A propos de courage, de Tim O'Brien)

1 commentaire:

  1. C'est toute notre histoire, ça. Moi qui vous écris avec un lyrisme hautement spiritualisé, vous qui m'opposez un mur de silence, tel l'obscur qui vient à la rencontre de sa propre renonciation au sein de l'Ouvert qui se ferme à lui-même dans sa propre ouverture fermée de placard (c'est une citation de Maurice Blanchot).

    Bien sûr, je n'écris pas pour un copain mort, et jamais, AU GRAND JAMAIS, je ne vous traiterais de connasse. M'enfin, c'est quoi ces insinuations ?

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