vendredi 23 septembre 2011

Une mère ordinaire

"A un kilomètre de là, Eva Wilt se dirigeait vers sa maison avec une détermination qui ne cadrait pas du tout avec son aspect extérieur. Les quelques personnes qui la remarquèrent comme elle descendait, l'air préoccupé, par les rues étroites, ne virent qu'une ménagère ordinaire pressée de rentrer préparer le dîner de son mari, et de coucher les enfants. Mais sous son air ordinaire, Eva Wilt n'était plus la même. Finies la stupidité joyeuse et les idées toutes faites. Elle n'avait plus qu'une pensée en tête ; elle rentrait chez elle et personne ne saurait l'en empêcher. Ce qu'elle ferait une fois sur place, elle n'en avait pas l'ombre d'une idée. D'une manière confuse, elle se rendait compte que sa maison n'était pas simplement un lieu d'habitation. C'était aussi ce qu'elle était, elle, femme d'Henry Wilt et mère de quadruplées, une travailleuse descendant d'une lignée de travailleuses qui avaient nettoyé des planchers, préparé des repas et maintenu des familles unies en dépit des maladies, des décès, et des caprices des hommes. Elle ne s'en rendait pas clairement compte, mais c'était ce qui la faisait s'avancer comme par instinct."

(Tom Sharpe, "Wilt" 2)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire