lundi 4 juillet 2011

Nécessité de l'homme.


Dans ce passage de Kundera , un fils, Jaromil, rentre chez lui  : sa mère (qui vit sans mari et seule avec le fiston) le questionne :

"Je tremblais pour toi! Où étais-tu? Tu n'as aucun égard pour moi!"
(...)
Tu m'assassines! Tu m'assassines! s'écria t-elle d'une voix hystérique, et elle s'élança dans la pièce voisine.
Jaromil restait cloué sur place, épouvanté, et il avait le sentiment d'avoir commis une grande faute.
(Ah, petit, jamais tu ne te débarasseras de ce sentiment-là. Tu es coupable, tu es coupable! A chaque fois que tu sortiras, tu sentiras derrière toi un regard réprobateur qui te criera de revenir! Tu iras par le monde comme un chien attaché à une longue laisse! Et même quand tu seras loin, tu sentiras toujours le contact du collier sur ta nuque! Et même quand tu passeras ton temps avec des femmes, même quand tu seras avec elles dans leur lit, il y aura une longue laisse à ton cou et quelque part au loin ta mère en tiendra l'extrémité et sentira au mouvement saccadé de la corde les mouvements obscènes auxquels tu t'abandonnes!)"

"La vie est ailleurs", Kundera.

Voilà un passage qui en dit long sur la nécessité d'avoir un homme, un mari, un époux,  qui est celui qui coupera cette "laisse" entre la mère et les enfants.


cf aussi ce texte de Philippe Roth tiré de "La tâche"



22 commentaires:

  1. très appréciable la crevette, j'ai tout de suite pensé à Portnoy et son complexe avec l'extrait de Kundera et ensuite vous renvoyez vers la tâche...Bien à toi

    RépondreSupprimer
  2. Bon sang , c'est génial , c'est le summum du glauque ...
    Mais je ne suis pas sûr que ce soit le Père qui "coupe la laisse" , elle est surtout remplacée par une alliance . En l'occurence , cette mère a un comportement d'épouse hystérique vis-à-vis de son fils .

    RépondreSupprimer
  3. Prolo : Ça n'est pas le père qui coupe la laisse, j'insiste, c'est l'homme en tant que mari. S'il veut sauvegarder son couple et aider sa femme et ses enfants, il doit couper le cordon en préservant le couple même contre les enfants.Une mère ne peut rien faire toute seule, certainement pas rendre la liberté à ses enfants, ça n'est pas possible pour elle-même; si elle peut l'envisager ou le concevoir, elle aura beaucoup de difficultés à le réaliser seule(personnellement je pense que c’est impossible). L'époux doit s'interposer pour son bien à elle et pour le bien de ses enfants.
    D’où le drame de toutes ces mères isolées sans homme.
    Personnellement il me suffit d'un week end sans mari pour comprendre le problème avec mes six garçons...
    Cherea : Oui Roth est vraiment génial, j'aime le lire.
    Plouc, il est passé où votre commentaire?? Je ne comprends pas...

    RépondreSupprimer
  4. Ah Plouc est allé à Roth directement!

    RépondreSupprimer
  5. Prolo De La Lite4 juillet 2011 à 21:54

    Oui , c'est exactement ce que j'ai voulu dire . Dans un couple de lesbiennes , celle qui boit le plus de bières et pisse debout ne joue pas ce rôle .
    Mais vous semblez penser que l'époux doit protéger la mère de ses enfants , ce sont surtout les enfants qui doivent être maintenus à l'écart de la toute-puissance de la mère par l'époux .

    RépondreSupprimer
  6. C'est drôle, je voulais aussi parler des lesbiennes mais j'ai renoncé...et oui pour cela : "ce sont surtout les enfants qui doivent être maintenus à l'écart de la toute-puissance de la mère par l'époux "

    RépondreSupprimer
  7. Robert Marchenoir4 juillet 2011 à 23:39

    Belle photo, et blog faisant une pub très efficace pour la famille (ceci dit sans ironie aucune, je m'empresse de le préciser -- un malentendu est si vite arrivé sur le Web...).

    RépondreSupprimer
  8. Oui l'ironie a beau jeu, vous avez raison Marchenoir mais de votre part je sais que vous parlez toujours en vérité et ça me convient parfaitement.

    RépondreSupprimer
  9. Je ne remets pas en cause la validité de la lecture que tu fais de ce texte de Kundera. Mais pour ma part j'en vois un autre.

    "Se faire du souci" pour quelqu'un peut-être la manière la plus plus subtile et la plus vicieuse de lui manifester son égoïsme, son mépris et même sa volonté de lui nuire.

    Moi, je crois que lorsque l'on aime les gens et que l'on a pris la peine de les connaître, on ne se fait pas beaucoup de souci pour eux. C'est une agression terrible, de dire à quelqu'un "je me fais du souci pour toi".

    Ca veut dire "je ne te connais pas et je ne veux pas te connaïtre. Je me moque bien d'où tu peux tirer la force d'affronter les dangers et ta confiance en toi, puisque tu n'existes pas vraiment pour moi. A partir de toi, j'ai crée un personnage fictif, un autre toi qui est ma création, que je contrôle paisiblement. En bougeant, en t'éloignant, tu fous tous ça en l'air, tu me fais faire du souci. Or, de toi, je n'ai jamais rien attendu d'autre que tu te sacrifies, que tu sois la glaise avec laquelle j'ai forgé ma création".

    Les gens inquiets ne le sont que pour eux-même, la plupart du temps.
    Et puis transmettre ses angoisses à quelqu'un, ça ne peut lui servir à rien d'autres qu'à lui foutre la poisse. A le forcer à prendre sa part de souffrance. Comment peut-on vraiment affirmer "être en souci pour l'autre" sans voir que l'on est en train de lui nuire?

    Il n'y a pas plus agressif, vindicatif et narcicique que cette phrase "je suis inquiet pour toi".

    RépondreSupprimer
  10. XP : "Il n'y a pas plus agressif, vindicatif et narcicique que cette phrase "je suis inquiet pour toi".

    Je ne crois pas que ton analyse diffère fondamentalement de ce que j'ai écrit au dessus.
    L'extrait de Kundera met en exergue cette volonté de puissance ou de contrôle apparenté à tort ici à de "l'amour maternel". Il s'agit bien d'une puissance maternelle dévoyée ou pour le moins hors de contrôle, démesurée, parce que justement il y manque l'élément stabilisateur qui équilibre, l'homme en tant qu'époux.
    Sans lui, effectivement, cette inquiétude devient la traduction d'un égoïsme, et seulement d'un égoïsme.
    Mais j'ajouterais que même avec un homme, un vrai, nos intentions ne sont jamais pures à 100%, nous restons humains c'est à dire marqués par le péché et perfectibles.
    Évidemment que notre inquiétude traduit un doute quant à la façon dont nos amis ou notre enfant va se sortir de situations difficiles.Évidemment que ce doute témoigne de ce que nous ne connaissons pas complètement nos amis et nos enfants et ne savons pas comment ils réagiront dans ces mêmes situations, nous ne savons même pas parfois comment nous-mêmes nous réagirions!
    Est-ce à dire pour autant que nous ne pensons qu'à nous? Je ne le pense pas. Purifier au mieux nos intentions et nos actes, c'est peut-être cela devenir un saint.

    RépondreSupprimer
  11. Je ne dis pas que les gens qui "s'inquètent" ne pense qu'à eux... Je dis que c'est leur part d'ombre qui s'exprime principalement, quand ils tiennent à le faire savoir.

    RépondreSupprimer
  12. Prolo De La Lite5 juillet 2011 à 16:34

    Du coup , n'est-ce pas le concept de proprieté qui a perverti les relations mères-enfants ? ^^

    Un parent est toujours responsable d'un enfant mineur , mais pas propriétaire . Si l'ont vous confie pour dix-huit ans un capital de 500.000 euros , vous aurez peut-être envie de l'investir ou le placer dans votre intérêt , la mise de départ sera la même pour celui qui vous l'a confié . C'est la même chose pour un enfant . Etre mère , et dans une moindre mesure père , suppose un certain sacrifice , les parents peuvent déplacer sans problême les frontières entre propriété et responsabilité , toujours avec bonne conscience .
    Madame a renoncé à une carrière de danseuse classique car enceinte , nul doute que sa fille sera poussée avec insistance dans cette voie , pure colonisation de l'esprit .
    L'inquiétude est une manière de revendiquer un droit de propriété sur autrui sous prétexte de légitimité morale . Mais toujours sous prétexte du bien commun .
    La volonté de puissance de la mère est toujours sans limite , d'ou la nécessité du père , d'un modèle à suivre plutôt que d'un caporal à nichons à écouter .

    RépondreSupprimer
  13. "un caporal à nichons" : charmant! ^^

    Non, le concept de propriété n'a rien perverti (enfin: ne devrait rien pervertir) parce que, normalement, il ne s'applique pas aux relations parents-enfants : nous ne sommes pas effectivement "propriétaires" de nos enfants mais simplement les responsables ou les dépositaires.

    RépondreSupprimer
  14. Prolo De La Lite5 juillet 2011 à 18:10

    Mais enfin , c'est précisément ce que j'ai dit !!! Est-ce que je m'exprime si mal que ça ?

    Le respect de la propriété suppose la conscience des frontières , c'est évident !!!

    RépondreSupprimer
  15. Non, vous vous exprimez fort bien et je répète comme un perroquet, mais ne faites pas attention, ça m'aide à comprendre.

    RépondreSupprimer
  16. Voilà, c'est ça, tu es un caporal à nichons.

    Je cherchais le mot.

    RépondreSupprimer
  17. Prolo De La Lite5 juillet 2011 à 20:56

    Vous comprenez vite , mais il faut vous expliquer longtemps , c'est ça ?

    RépondreSupprimer
  18. Robert Marchenoir7 juillet 2011 à 00:43

    Il y a un article sur vous dans The Spectator...

    http://www.spectator.co.uk/essays/7045183/liberty-equality-fecundity.thtml

    Je n'ai pas encore lu l'équivalent en français.

    RépondreSupprimer
  19. Chère Crevette,

    La photo est splendide et me fait rêver à l'avenir avec mon petit bout de gars de 9 mois (encore que ce salopiaud ne soit visiblement pas décidé à s'endormir ce soir)
    Le texte et vos commentaires, c'est uniquement votre expérience, ou c'est du Aldo Naouri "in vivo"?
    Je viens de lire le dernier ouvrage de ce pédiatre, on retrouve tout à fait ce qu'il écrit dans votre expérience.

    Popeye

    RépondreSupprimer
  20. Popeye,
    je vais vous avouer un secret : ne le dites à personne surtout!^^
    Je ne lis jamais, jamais de manuels de pédiatrie ou de psychologie, même des excellents : ils me filent les chocottes parce que je mesure à chaque fois l'abîme qui me sépare de ce que je devrais faire idéalement pour bien élever mes enfants...

    Les textes choisis reflètent toujours une expérience personnelle.
    Dans le cas présent, ce qui m'a poussée à mettre ces textes lus récemment (Kundera et Roth) sur la nécessité de l'homme dans une famille, c'est une réflexion d'un de mes jumeaux lors du week end début juillet pendant l'absence de mon mari. Basile, je crois, m'a demandé : "si Papa n'est pas là maman, est-ce qu'on pourra venir te voir dans ta chambre le matin?" Il faut vous dire que chez nous la chambre conjugale est strictement interdite aux enfants. Ils n'y viennent jamais. Ceci du fait de mon mari qui l'exige absolument et je me conforme à cet ord..., ce "souhait"^^(sauf évidemment si l'un d'entre eux est malade la nuit ou bien Gabrielle encore en ce moment mais je compte l'installer assez rapidement ailleurs).
    Tout cela pour dire que dès que le mari n'est pas là les souris veulent danser!^^ Je me rends compte à quel point il est facile d'être mère trop possessive et pas assez épouse!^^ pour le plus grand dam de mon mari et de mes enfants aussi, sur le long terme.

    RépondreSupprimer
  21. Je trouve difficilement plus abouti et plus intelligent que Kundera.

    RépondreSupprimer