Pierre en casquette, à droite avec son frère François. |
Trouvé dans les œuvres complètes de Flannery O'Connor, ce passage à propos d'un petit garçon placé dans une Institution de religieuses et c'est une religieuse, Mère Alphonsa, qui raconte : ce portrait est à mourir de rire et je retrouve quelques traits assez précis de mon Pierre qui va avoir 12 ans dans deux jours et qui bien souvent nous laisse, son père et moi, quelque peu perplexes et démunis devant notre tâche éducative...
"L'enfant nous fut amené par un membre de l'institution pour séjourner quelque temps parmi nous. Dès le premier coup d'œil que je jetai sur cette frimousse intelligente, rose et brillante de santé, un frisson prémonitoire saisit mon âme. N'était-ce pas là le florissant rejeton d'une souche criminelle? Il y avait dans l'insolence de son regard une vigueur démoniaque... J'entrepris de le catéchiser. Avec la meilleure volonté du monde il demeurait tranquillement assis devant moi et répondait correctement à mes questions. "Son catéchisme, il préfère l'étudier plutôt que de rester à ne rien faire, disait sa grand-mère. Moi aussi je lui faisais réciter dans le temps;" Au cours de ces leçons, les yeux de l'enfant prenaient une sorte de flou mystique et j'étais convaincue qu'il ne mentirait plus et que ce petit barbare allait devenir doux et tendre.
Nous cachions la nourriture dans les coins sombres car ce chérubin était trop bien nourri. Nous masquions ou nous démontions ses larcins et ses farces, et les jolis habits que j'avais choisis pour lui curieusement disparurent, comme son costume neuf du dimanche, lorsqu'il s'en fut visiter sa mère... En quelques semaines notre Willie passa pour le pire garnement du quartier, alors que notre voisinage était infesté de petits vauriens. Les pensionnaires de la maison et des pavillons adjacents avaient peur de lui, les chenapans faisaient cercle autour de lui quand il se précipitait dans cette rue diabolique livrée aux outrages des jeunes ou des vieux. Willie allumait des feux sur le toit des baraques, nous jetait des briques dont seuls nos anges gardiens pouvaient préserver nos têtes, et plusieurs fois il alla jusqu'à blesser plusieurs petits garçons que nous dûmes recoudre dans notre salle de repos. Il poussait des exclamations si épouvantables que les oreilles profanes étaient choquées... Il adorait les images des saints que je lui donnais, volait celles que je ne lui donnais pas, et les revendait toutes. Je le sermonnais affectueusement. Docile, il m'écoutait, promettait de "faire attention", et se montrait fort contrit de ses péchés quand une poigne de fer lui en avait fait accepter la révélation. Il fit une très favorable impression sur un prêtre expérimenté que nous fîmes appeler pour sauver son âme, mais une fois relâché, il alluma un immense feu de joie sur le toit de notre resserre à bois. Sa pauvre grand-mère se mit à avoir de graves hémorragies, provoquées par le choc et par les réprimandes qu'elle lui devait faire. Avant qu'il n'arrive, elle l'appelait "mon petit ange". Plus prudente désormais, elle se bornait à déclarer qu'il ne manquait pas de cœur."
PDLL
RépondreSupprimerMais quel genre de mères indignes laisseraient leur progéniture grimper sur les toits ?!?
Jamais la mienne n'aurait permis une telle chose .
Cet extrait de Flannery O'Connor me fait penser à "L'Enfance Nue" de Maurice Pialat: le turbulent poulbot un peu vaurien avec un bon fond recueilli par une famille de petites gens du Nord. Ca vous plairait surement. Je l'avais vu à la fac et ça m'avait ému presque aux larmes mais j'l'avais dit à personne de peur que les potes se foutent de ma fiole.
RépondreSupprimerFrançois
Merci François, je n'ai pas vu ce film et je le regarderai bien volontiers. Je rencontre beaucoup de jeunes adultes qui ont gardé une forme d'innocence enfantine malgré des vies difficiles et ou des métiers très durs et cela m'a toujours rendue optimiste pour l'avenir.
RépondreSupprimerPDLL : ça vous va bien, vous qui passez votre vie dans les hauteurs...^^
De toutes les façons, je ne peux rien faire, j'ai le vertige dès que je monte sur un tabouret.