mercredi 17 décembre 2014

Réfutation du discours étatiste d'Eric Zemmour par Jeremy Boer


2 commentaires:

  1. Critique justifiée dans l'ensemble.

    On fait dire des choses à de Gaulle qui étaient à l'opposé de ses convictions. Discours du 17 novembre 1961 devant le Conseil économique et social : "Je veux évoquer également la nécessité de rejeter l'autarcie, qui équivaudrait aujourd'hui à la misère ou tout au moins, à la médiocrité, l'obligation de vivre en relations économiques constantes et multipliées, avant tout avec les cinq autres Etats européens de la Communauté naissante et avec les peuples africains liés à nous par la coopération, mais aussi avec le monde entier, par conséquent de maintenir le niveau et la balance de nos échanges, sous peine d'être ruinés et asservis."

    Cependant, il faut faire preuve de circonspection. Le libéralisme est affaire de mesure. La mondialisation a bel et bien des aspects négatifs, qui n'existaient ni au temps de Bastiat ni au temps de de Gaulle. Le transport aérien bon marché et la "libre circulation des travailleurs" au sein de l'Europe n'existaient pas du temps de de Gaulle. L'informatique et Internet n'existaient pas du temps de Bastiat.

    Si vous importez des esclaves polonais que vous payez trois fois moins cher que des Français pour les travaux des champs ou du bâtiment, ce n'est pas "favorable aux consommateurs", parce que vous interdisez définitivement des pans entiers du marché du travail à des gens qui ne savaient faire que ça. Si vous faites de la (mauvaise) traduction ou de la (mauvaise) comptabilité en Inde pour quatre fois moins cher, ce n'est pas favorable à la consommation des traducteurs et des comptables français, parce que ça détruit leur métier et leur expérience, qui ont pris des générations à s'affiner. Il suffit de voir les dépêches de l'AFP, désormais écrites en petit nègre parce que les gens sont incapables de traduire, parce que le souci de qualité a disparu.

    Et, non, les chômeurs ne "retrouveront pas forcément un emploi". Ca, c'est vrai sur le papier, dans les rapports des technocrates. Ce n'est pas vrai dans la réalité.

    Dans la réalité, les adaptations prennent du temps, et la vie humaine est courte. Ce n'est que dans les fantasmes des économistes que "chacun de nous devra s'habituer à exercer plusieurs métiers au cours de sa vie". C'est très joli dans le principe, mais dans la vraie vie cela prend du temps de se former à un métier, et d'ailleurs les employeurs ont tendance à exiger des gens qui ont fait le même métier toute leur vie, contrairement aux belles théories des économistes et aux beaux slogans des politiciens.

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  2. En Suisse, qui est l'un des pays les plus libéraux du monde, la douane inflige régulièrement des amendes à des petits contrebandiers qui importent, de France ou d'Allemagne, quelques kilos de... frites surgelées, ou de l'huile de cuisson pour le restaurant du coin. La Suisse "ultra-libérale", contrairement à la France communiste, possède effectivement des barrières douanières à ses frontières avec l'Europe. Elle a fait le choix, par exemple, de protéger son agriculture, de qualité mais chère, puisque de montagne. Elle a bien raison.

    Une nation, ce ne sont pas simplement des chiffres dans un tableau Excel, des emplois abstraits et des paysans qui peuvent (nous assurent ceux qui n'ont jamais essayé) devenir codeurs en Java sur un claquement de doigts. Les Suisses tiennent à vivre avec des paysans suisses, et ils ont bien raison. Et pourtant, s'il y a un pays branché sur la mondialisation, c'est bien celui-là.

    La violence de la mondialisation est destructrice. C'est bien gentil de parler de "la destruction créatrice", mais à partir d'un moment la quantité se transforme en qualité, et la création est empêchée par la destruction.

    Il fut un temps où l'Angleterre, pourtant patrie du libéralisme, interdisait carrément, non pas l'importation de travailleurs européens, mais l'exportation des ouvriers qualifiés britanniques ! Ils avaient carrément interdiction de sortir du territoire, pour ne pas faire profiter les pays étrangers de leur savoir-faire ! Mesure qui a duré le temps d'accumuler du capital et de distancer les pays concurrents, mais qui a bel et bien existé.

    Donc encore une fois, tout est affaire de mesure et de circonspection. Le protectionnisme n'est pas forcément à rejeter en bloc et en tout temps. Le dogmatisme et les proclamations de principe sont à fuir.

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