vendredi 27 septembre 2013

"Tu trouveras peut-être Dieu pour de bon."





"A quoi cela nous sert-il d'avoir Dieu? lui disais-je. Pourquoi est-ce qu'il a laissé mourir ma mère et ma sœur de manière aussi absurde. S'il nous aime tant que ça, pourquoi est-ce qu'il nous laisse souffrir ici?
-Tu es contre le Dieu auquel on t'a appris à croire quand tu étais enfant, me répondait Arturo. Un Dieu qui est censé te surveiller et te protéger, qui répond à tes prières et te pardonne tes péchés. Ce Dieu-là n'est qu'une fable. Les religions s'efforcent de saisir Dieu, mais Dieu est bien au delà des religions. Dieu échappe totalement à notre compréhension. Nous ne sommes pas en mesure de comprendre Sa volonté, on ne peut pas le réduire à un livre. Il ne nous a pas abandonnés et ne nous sauvera pas. Il n'a rien à voir avec le fait que nous soyons ici. Dieu ne change pas, il est, tout simplement. Je ne prie pas Dieu pour obtenir Ses faveurs, je prie pour être près de Lui, et en priant, je remplis mon cœur d'amour. Quand je prie de cette façon, je sais que Dieu est amour. Quand je ressens cet amour, je sais bien que nous n'avons pas besoin d'anges ou de paradis, parce que nous sommes déjà une partie de Dieu.
Je secouais la tête. "J'ai tellement de doutes. Et j'ai l'impression d'avoir mérité le droit de douter.
-Fais confiance à tes doutes, me disait Arturo. Si tu as les couilles de douter de Dieu, et de remettre en cause toutes les choses qu'on t'a apprises à son sujet, alors tu trouveras peut-être Dieu pour de bon. Il est près de nous, Nando. Je le sens tout autour de nous. Ouvre les yeux, tu le verras toi aussi."
J'observais Arturo, ce jeune socialiste plein de ferveur, allongé dans son hamac, les jambes brisées comme des bouts de bois, avec un regard éclatant de foi et d'encouragement, et j'ai eu pour lui un grand élan d'affection. Ses mots me touchaient profondément. Comment un garçon aussi jeune avait-il réussi à se connaître aussi bien? En parlant avec lui, j'étais forcé de reconnaître que je n'avais jamais pris ma vie au sérieux. J'avais toujours tout tenu pour acquis, j'avais consacré mon énergie à courir les filles, à conduire des voitures et à aller à des soirées. Je vivais tranquillement au jour le jour. Après tout, pourquoi se précipiter? Il serait toujours temps de me décider et de réfléchir. Il y avait toujours un lendemain...
Je me moquais tristement de moi, en pensant que si Dieu existe, et s'il voulait que je fasse attention à lui, eh bien c'était gagné. Je me suis penché en avant et ai posé mon bras et mon épaule sur la poitrine d'Arturo pour lui transmettre un peu de chaleur. J'écoutais sa respiration régulière, de temps en temps je sentais son corps se tendre de douleur et je me disais : ça, c'est un homme."


("Miracle dans les Andes", Nando Parrado)

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