samedi 25 août 2012

"Recréer la vérité"


Voilà pourquoi je lis Dantec : cette façon incroyablement puissante et lucide de poser les bases d'une vraie métaphysique!! 
Je tanne mon très cher mari pour qu'il intègre dans sa version "grand public" de son cours de philosophie, Dantec! Avec un texte de ce genre, il ne pourra que s'incliner...

"La littérature n'est pas le plus "immatériel" de tous les arts, tout au contraire; elle ne s'impose pas selon les métriques d'une transcendance platonicienne bien cadencée une fois pour toutes, comme si l'écrivain se contentait de "découvrir" des vérités éternelles et ultimes sous le jeu des apparences du monde matériel; l'écrivain d'aujourd'hui, et depuis longtemps, doit de toutes ses forces recréer la vérité, c'est-à-dire ne pas se contenter de reproduire sous des formes plus ou moins cachées une vérité préexistante à l'oeuvre, mais faire de l'oeuvre même le terrain d'une expérience menée sur la vérité, comme disait Nietzsche, faire surgir de son travail à l'origine purement mental un monde métaphysique susceptible, non seulement de prendre racine dans le réel, en le contaminant de manière terminale; c'est pour cela que l'écrivain doit impérativement soumettre l'Homme à la question, il doit torturer la mémoire de l'humanité et déjà pour commencer celle du XXe siècle afin de lui faire accoucher ses projets secrets concernant le futur, c'est-à-dire notre présent, il doit faire de même avec la réalité présente, afin de lui faire avouer ses plans occultes pour l'avenir, et il ne doit pas avoir peur d'interroger directement cet avenir, qui, seul, bien sûr, contient l'explication du passé."

Le théâtre des opérations, Journal métaphysique et polémique 1999

1 commentaire:

  1. Bonjour.
    En effet, ce serait pas mal de faire étudier ce texte.
    Je me rappelle la philo en terminale L, et le premier cours était sur Descartes et la métaphysique. Le principe m'avait paru très compliqué, jusqu'au moment ou, avec l'exemple de la bougie, j'ai eu l'impression qu'on me faisait saisir quelque chose de magnifique, presque insaisissable.
    J'avais trouvé ça génial. Une fois fondue, la bougie, est toujours une bougie.
    Et pourtant son apparence ne le dit pas forcément.
    Vous me direz, j'interprète, grossièrement sans doute, mais ça allait être la base de tout ce qui allait suivre, de ce doute qui en permanence devrait nous faire s'interroger avant toute conviction, opinion ou acte.
    Mais alors, si l'univers a sa propre dynamique, l'humanité en a-t-elle la sienne, et a-t-elle un projet? S'il s'avère qu'on n'en a pas, il est urgent que l'on s'interroge sur cette conscience collective, mais si difficile à observer car modernisme oblige, trop plein de technologies peuvent empêcher un esprit d'y voir clair..

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