Trouvé dans La grande parade de Jean-François Revel, p 51-52 éditions Plon-pocket , 2000 :
« On reconnaît ici la théorie selon laquelle seules les « luttes », les grèves, les occupations d’usines, voire les émeutes auraient permis le progrès social, qui n’aurait été obtenu que lorsqu’il était arraché aux propriétaires des moyens de production. Or il s’agit là d’une reconstruction de l’histoire par l’imagination marxiste. Des dizaines d’années avant l’apparition des premiers partis communistes et même des premiers théoriciens socialistes, ce sont les libéraux du dix-neuvième siècle qui ont posé, avant tout le monde, ce que l’on appelait alors la « question sociale » et qui y ont répondu en élaborant plusieurs des lois fondatrices du droit social moderne. C’est le libéral François Guizot, ministre du roi Louis-Philippe qui, en 1841, fit voter la première loi destinée à limiter le travail des enfants dans les usines. C’est Frédéric Bastiat, cet économiste de génie que l’on qualifierait aujourd’hui d’ultralibéral forcené ou effréné, c’est lui qui, en 1849, député à l’Assemblée législative intervint, le premier dans notre histoire, pour énoncer et demander que l’on reconnaisse le principe du droit de grève. C’est le libéral Émile Ollivier qui, en 1864, convainquit l’empereur Napoléon III d’abolir le délit de coalition (c'est-à-dire l’interdiction de faite aux ouvriers de se regrouper pour défendre leurs intérêts), ouvrant ainsi la voie au syndicalisme futur. C’est le libéral Pierre Waldeck-Rousseau qui, en 1884, au début de la Troisième République, fit voter la loi attribuant aux syndicats la personnalité civile. Est-il permis de souligner, tout en le rappelant, que les socialistes de l’époque, de par leur logique révolutionnaire (bien antérieure à l’apparition du moindre parti communiste) manifestaient une violente hostilité à l’égard de cette loi Waldeck-Rousseau ? Car, dissertait Jules Guesde, « sous couleur d’autoriser l’organisation professionnelle de notre classe ouvrière, la nouvelle loi n’a qu’un but : empêcher son organisation politique ». La suite, démentant ce perspicace pronostic, montrera, tout au contraire, que l’une devait favoriser l’autre. Ce sont les grands syndicats ouvriers qui servirent de socle et même de source de financement pendant longtemps au parti travailliste britannique, au parti démocrate américain, au parti socialiste allemand ainsi qu’aux divers partis socialistes réformistes de l’Europe scandinave. C’est aussi dans ces pays, en l’absence presque complète de tout aiguillon communiste, que surgirent et se perpétuèrent les syndicats ouvriers les plus puissants. C’est au contraire dans les pays, et notamment en France, où les partis communistes acquirent un poids politique important qu’ils affaiblirent le syndicalisme à force de l’idéologiser. On le sait, les adhérents syndicaux représentent en France un pourcentage infime de la population active. D’autre part, le syndicalisme français, quelle que soit l’idéologie de ses diverses centrales, en vint rapidement à ne plus défendre que des intérêts catégoriels, essentiellement ceux des agents de la fonction publique et des services publics, travailleurs déjà privilégiés par rapport aux salariés du secteur marchand. Il y a plusieurs décennies que les syndicats français ne remplissent plus les critères de la représentativité définis par la loi au début des années cinquante et en particulier le critère selon lequel un syndicat n’est légitime que s’il peut vivre des cotisations de ses adhérents. Les syndicats français, depuis belle lurette, ne subsistent que grâce aux subventions, directes ou indirectes, de l’Etat, c'est-à-dire grâce à de l’argent soustrait à des contribuables dont l’immense majorité n’est pas syndiquée. Le rôle d’aiguillon du progrès qu’auraient joué les partis communistes ne semblent pas démontrable. On peut même dire que dans bien des cas la présence dans le jeu politique d’un fort parti communiste a ralenti le progrès social au lieu de l’accélérer. Par exemple, à la fin des années cinquante et au début des années soixante, le PCF se mit en tête de défendre avec acharnement la théorie stupide de la « paupérisation absolue » de la classe ouvrière. Et cela au moment même où un décollage économique sans précédent dans l’histoire de France était en train, au contraire, de permettre à la classe ouvrière d’accéder à un niveau d’aisance auquel elle n’aurait même pas osé songer au moment du Front populaire, vingt ans auparavant. En fait, la seule paupérisation absolue de la classe ouvrière que le vingtième siècle nous ait donné l’occasion de contempler, s’est produite dans les pays communistes et seulement dans ces pays. »
La déchristianisation est un fait incontournable dans nos sociétés occidentales. Les causes en sont multiples. Mais le résultat dramatique est un vide spirituel et rituel béant devant des religions nouvelles venues, conquérantes et totalement décomplexées.
RépondreSupprimerOr, il serait vain de chercher à ramener au christianisme les "brebis égarées" dans l'athéisme en comptant sur la "bonne nouvelle". La foi, ça ne se commande pas: Nul ne se mettra à croire par simple injonction. Par contre, les beaux rites traditionnels en latin, le mystère, l'encens, les processions, le chant grégorien, tout ce vénérable patrimoine venu du fond des âges, tout cela peut attirer et séduire nombre de non-croyants.
Après avoir massacré la tradition latine plus que millénaire pour faire "moderne" et s'être aplatis devant les nouvelles idoles du politiquement correct, les "nouveaux" cathos ont fini de dégoûter les derniers non-croyants qui restaient cependant attachés aux beautés de la "vieille" liturgie. Ils ont réussi le tour de force d'éloigner presque toute la société de l'Eglise, et donc du Christ. Désormais, le jeune homme déprimé ou en souffrance morale n'aura même plus l'idée d'entrer dans une église comme son aïeul l'aurait tout naturellement fait dans les mêmes circonstances. Chacun a, au cours de sa vie, des moments de détresse morale, et ce sont ces moments qui peuvent être propices à une "conversion". Faute d'une forte présence de l'Eglise, ce jeune homme se fera peut-être musulman, bouddhiste ou héroïnomane. Loin des yeux, loin du cœur. Faute de s'affirmer dans l'espace public par les processions, les croix, les bannières, l'encens, l'eau bénite, les "Te Deum" et les "Dies Irae", l'Eglise est devenue incolore, inodore et sans saveur... et sans aucun intérêt pour la grande majorité de nos contemporains. Et le Christ avec elle. Faute de tolérer en son sein des non croyants qui ne viennent que pour les cantiques en latin, le "mystère" et l'odeur de l'encens, l'Eglise sera trop loin d'eux le jour où ils seront "prêts". Quel beau gâchis!
J'invite donc tous les croyants qui sont conscients du désastre en cours à relayer mon appel auprès des non-croyants et autres athées de leur connaissance à se "re-convertir" à une nouvelle forme de christianisme culturel, traditionnel et NON-DOGMATIQUE.
A défaut d'être croyants, invitez-les à se faire CHRISTIANISTES!!
Etre "christianiste" signifie que, sans être croyant, on se présente néanmoins comme défenseur de l’héritage chrétien de l’Europe et de la France, et qu'on est prêt à pratiquer, au moins occasionnellement, la liturgie et les rites antiques de l’Eglise, non par croyance, mais par fidélité à ses ancêtres. Et aussi pour manifester son refus de la désincarnation spirituelle de la France et de l’Europe. Pour que les églises et cathédrales, sanctuaires de notre identité multiséculaire, ne deviennent pas de simples musées, vestiges d’un peuple et d’une civilisation qui ne sont plus.
Non-croyant et christianiste moi-même, je les invite à se "convertir". C'est ici:
http://www.albinus.org/christianitas/inscript.php
Ainsi, sans violer les consciences, nous augmenterons néanmoins l'armée des défenseurs de l'Europe Chrétienne!
Alcuin,
RépondreSupprimerJe vous suis dans votre message ou proposition jusqu'à un certain point.Vous dites : "à défaut d'être croyants, devenez christianistes!" C'est un peu comme le pari de Pascal, première étape pour celui qui se tourne vers Dieu sans avoir encore la foi. Mais vouloir réinventer une sorte de nouvelle église avec ses convertis me paraît saugrenu.
Le problème de votre proposition c'est que vous distinguez une Église temporelle, imparfaite, concrète, une réalité visible composée d'hommes et de femmes pécheurs, capables du pire comme du meilleur et ceci même dans ses élites que sont nos prêtres, évêques et papes... L'exemple de papes criminels n'est pas rare dans l'histoire de l'Église.
Mais il y a aussi un autre aspect de cette même Église, une réalité qui, si elle est invisible, n'en existe pas moins et n'en est pas moins réelle : le fait que l'Église c'est le Christ qui est le Saint, qui est Dieu. Nous sommes les membres de cette Église dont le Christ est la tête. L'Église, c'est aussi est avant tout le "corps mystique du Christ" qui a pris tous nos péchés sur Lui, est mort sur la croix et en mourant, a fait mourir ce péché, et en ressuscitant, nous a donné la vie et le salut. Nous participons de cette mort et résurrection puisque nous sommes membres de l'Église en nous faisant baptiser c'est à dire en recevant la grâce, la vie divine en nous.
Votre invitation christianiste ne va pas assez loin, pour moi qui suis catholique, elle oublie le principal, l'essentiel, cette vie divine à laquelle je participe par le grâce de Dieu et qui fait de moi quelqu'un de radicalement différent puisque habité par Dieu. ça peut sembler carrément pompeux mais c'est un fait que Dieu a voulu habiter parmi nous. Il faut, absolument, profondément, sans cesse réclamer ce don de la foi et les jeunes gens en souffrance morale dont vous parlez ne seront comblés, à un certain moment, que par cette foi. Qui est transmise, certes par des hommes pécheurs, imparfaits, médiocres, etc... On s'en fiche, Dieu se fiche des canaux de la grâce, à partir du moment où celle-ci passe.L'Esprit souffle où il veut.
Notre imperfection est gage absolu, essentiel, de notre liberté et donc de notre adhésion et amour à notre Dieu. Si nous avions été parfaits, nous n'aurions pas en été "en manque", nous n'aurions rien désiré, et par conséquent nous n'aurions pas aimé. Or l'amour est au principe de nos vies et Dieu est l'Amour.
Voilà, cher Alcuin, ce que je voulais dire en complément de votre message.
'Notre imperfection est gage absolu, essentiel, de notre liberté et donc de notre adhésion et amour à notre Dieu. Si nous avions été parfaits, nous n'aurions pas en été "en manque", nous n'aurions rien désiré, et par conséquent nous n'aurions pas aimé."
RépondreSupprimerSuperbe, et ça mérite d'être creusé.
Hall of fame, comme dit Denis.
XP : allez au boulot! Creuse!
RépondreSupprimerhi hi hi hi hi !
RépondreSupprimerhttp://incarnation.blogspirit.com/archive/2007/01/21/le-sexe-des-mots.html
Revel, c'est vraiment une élocution remarquable, une clarté de la pensée et des convictions... et c'était un très bon vivant!
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