Une sainte Jeanne d'Arc qui sert de jouet aux enfants sur mon bureau.Elle a perdu sa bannière et son épée. Et son cheval. Mais elle tient debout, c'est pourquoi je l'aime beaucoup.
"Le christianisme en tant qu’être vivant n’a pas besoin de ses valeurs, de son dogme, tout vrai chrétien doit même s’atteler à le dépasser, toujours Nietzsche. Le reste ce n’est pas être chrétien c’est pratiquer le christianisme, c’est-à-dire tomber dans le meilleur des cas dans la religion (au sens de modèle de société avec des lois et d’apprivoisement à peu près stables) et dans le pire des cas dans la sclérose mentale dont l’islam est le symbole."
Dans : Les morts et les vivants par Kid A
le 29 août 2010 à 16 h 07 min
Pour n'importe quel catholique je suppose que cette réflexion d'un même pas catholique, d'un jeune de rien du tout pourra paraître blasphématoire et bien arrogante.
Elle me semble à moi tout bernasonienne, cette réflexion, et j'ai relu quelques passages des Prédestinés de Bernanos, recueil de textes où il évoque ses saints préférés et l'Eglise. Et ce recueil qui m'explique l'Eglise, qui me raconte l'Eglise mieux que mon catéchisme fait écho à cette petite phrase de Kid A (un enfant n'est-ce pas!) prononcée certainement, si l'on pouvait l'entendre, d'une voix douce et aimable.
Ce vrai chrétien dont Kid A perçoit toute la puissance et la valeur, ce vrai chrétien ce doit être le saint. Et Bernanos, qui aurait sans doute beaucoup, beaucoup aimé converser avec Kid A (Il me plait souvent d'imaginer des discussions ou des rencontres improbables; mais en lisant certains auteurs intemporels, je m'aperçois que tout est possible justement du fait de cette intemporalité) explique et précise ce concept de sainteté ou de chrétien véritable qui évite la sclérose mentale et spirituelle :
"Car l'heure des saints vient toujours. Notre Église est l'église des saints. Qui s'approche d'elle avec méfiance ne croit voir que des portes closes, des barrières et des guichets, une espèce de gendarmerie spirituelle. Mais notre Église est l'église des saints. Pour être un saint, quel évêque ne donnerait son anneau, sa mitre, sa crosse, quel cardinal sa pourpre, quel pontife sa robe blanche, ses camériers, ses suisses et tout le temporel? Qui ne voudrait avoir la force de courir cette admirable aventure? Car la sainteté est une aventure, elle est même la seule aventure.(...) Mais qui se met en peine des saints? On voudrait qu'ils fussent des vieillards pleins d'expérience et de politique, et la plupart sont des enfants. Or l'enfance est seule contre tous. Les malins haussent les épaules, sourient : quel saint eut beaucoup à se louer des gens d'église? Hé! Que font ici les gens d'église! Pourquoi veut-on qu'ait accès aux plus héroïques des hommes tel ou tel qui s'assure que le royaume du ciel s'emporte comme un siège à l'Académie, en ménageant tout le monde? Dieu n'a pas fait l'Église pour la prospérité des saints, mais pour qu'elle transmît leur mémoire, pour que ne fût pas perdu, avec le divin miracle, un torrent d'honneur et de poésie. Qu'une autre Église montre ses saints! La Nôtre est l'église des saints.(...) Notre tradition catholique les emporte, sans les blesser, dans son rythme universel. Saint Benoît avec son corbeau, Saint François avec sa mandore et ses vers provençaux, Jeanne avec son épée, Vincent avec sa pauvre soutane, et le dernière venue, si étrange et si secrète, suppliciée par les entrepreneurs et les simoniaques, avec son incompréhensible sourire -Thérèse de l'Enfant Jésus.(...) Ils vécurent, ils souffrirent comme nous. Ils furent tentés comme nous. Ils eurent leur pleine charge et plus d'un, sans la lâcher, se coucha dessus pour mourir. Quiconque n'ose encore retenir de leur exemple la part sacrée, la part divine, y trouvera du moins la leçon de l'héroïsme et de l'honneur.(...) Notre Église est l'église des saints. Tout ce grand appareil de sagesse, de force, de souple discipline, de magnificence et de majesté n'est rien de lui-même, si la charité ne l'anime.(...)Le moindre petit garçon de nos catéchisme sait que la bénédiction de tous les hommes d'église ensemble n'apportera jamais la paix qu'aux âmes déjà prêtes à la recevoir, aux âmes de bonne volonté. Aucun rite ne dispense d'aimer. Notre Église est l'église de saints. Nulle part ailleurs on ne voudrait imaginer seulement telle aventure, et si humaine, d'une petite héroïne [sainte Jeanne d'Arc] qui passe un jour tranquillement du bûcher de l'inquisiteur en Paradis, au nez de cent cinquante théologiens, " Si nous sommes arrivés à ce point, écrivaient au pape les juges de Jeanne, que les devineresses vaticinant faussement au nom de Dieu, comme certaine femelle prise dans les limites du diocèse de Beauvais, soient mieux accueillies par la légèreté populaire que les pasteurs et les docteurs, c'en est fait, la religion va périr, la foi s'écroule, l'Église est foulée aux pieds, l'iniquité de Satan dominera le monde! ..." Et voilà qu'un peu moins de cinq cent ans plus tard l'effigie de la devineresse est exposée à Saint Pierre de Rome...(...) Nul d'entre nous portant sa charge -patrie, métier, famille - avec nos pauvres visages creusés par l'angoisse, nos mains dures, l'énorme ennui de la vie quotidienne, du pain de chaque jour à défendre, et l'honneur de nos maisons, nul d'entre nous n'aura jamais assez de théologie pour devenir seulement chanoine. Mais nous en savons assez pour devenir des saints."
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