samedi 5 septembre 2009

Compagnons d'arme.

Après la journée de travail, quatre personnes restaient souvent sur le chantier : Roark, Mallory, Dominique et Mike Donnigan. Mike s'était trouvé jusqu'à présent sur tous les chantiers de Roark.
Ils s'installaient tous les quatre dans le studio de Mallory, après que tout le monde était parti. Une toile humide recouvrait la statue inachevée.La porte du hangar restait ouverte sur la première tiédeur d'une nuit de printemps.Sur une branche qui se détachait sur l'ouverture, on distinguait trois feuilles pareilles à des gouttes d'eau. Il n'y avait pas de chaises dans le hangar. Mallory, debout devant le poêle, faisait rôtir des saucisses et préparait du café. Mike, assis sur la sellette, fumait sa pipe. Roak était couché sur le sol, appuyé sur un coude. Dominique était assise sur un tabouret de cuisine, enveloppée d'une blouse, ses pieds nus sur le plancher nu.
Ils ne parlaient pas travail.Mallory racontait des histoires scandaleuses et Dominique riait comme un enfant.Ils parlaient de tout et de rien, et les mots se chargeaient de sens par le son de leur voix, par leur chaude gaité, par leur confiant bien-être.C'était tout simplement quatre personnes qui avaient du plaisir à être ensemble. Les murs qui s'élevaient dans l'obscurité, à quelques pas d'eux donnaient un sens à leur repos, leur donnaient le droit d'être gais; ce travail auquel tous contribuaient formait comme un accompagnement sensible au son de leurs voix. Roark riait comme jamais Dominique ne l'avait vu rire et il paraissait si jeune.
Ils restaient là très tard, dans le nuit qui s'avançait. Mallory leur versait du café dans un assortiment hétéroclite de tasses ébréchées. L'odeur du café se mêlait à celle de la nuit et de la verdure neuve.
(La Source vive, Ayn Rand)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire