Arlington cemetery
"- Je m'accroche à mon angoisse. Je la protège parce que j'en ai besoin. Je reste vif, sur la brèche.
- Tu ne vis pas avec moi. Tu vis avec les restes des morts. Tu déchiffres les indices, tu cherches les signes de mort, l'odeur de ta proie, puis tu la traques. Tu ne vis que pour ça."
Parfois, mais pas souvent, car regarder en arrière me fait toujours peur :
Qui sait quelles créatures nous suivent, s’agitent et peut-être effleurent
Nos froides épaules puis disparaissent dans l’ombre, invisibles présences
Qui hurlent leurs douleurs à nous, tous les vivants, dans un pesant silence
Parfois, je veux me souvenir du passé, des êtres qui l'ont peuplé
Des pays parcourus, des bonheurs reçus, une nostalgie sereine
Mais viennent les brûlures acides jamais vraiment cicatrisées…
D'une prime enfance heureuse, de toute une jeunesse fracassée.
Tous ces êtres qui ont illuminé la belle vie s’en sont allés
Je veux parfois les regarder de face, et virevolte en pas de danse
Léger, tends les deux mains en silence pour les saisir, les embrasser
Mais ils se fondent sans bruit dans l’obscurité, une ombre qui avance.
Ephémères rencontres, évanescentes prières pour ceux d’antan
Qui ne sont plus de ce monde et peuplent, muets, une autre dimension
Dont les liens brûlants et ténus sont à raviver précieusement,
S’enfoncer tremblants par nos prières dans les couloirs du temps, au fond
Du passé, le visiter et l’affronter avec son cœur flamboyant
Épurer les scories, lisser les traits tordus, accorder les pardons
Ouvrir en grand comme Jésus-Christ aux limbes descendu triomphant
Avec les clés de son Amour, grâce au feu brûlant de sa Passion
Les portes de l’oubli, les portes de vie, les portes du Paradis.
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