Quo vadis Domine
Révérend et filial message à Sa Sainteté le Pape François
du Prince Bertrand d'Orléans-Bragance
Des mouvements
radicalement opposés à la propriété privée,
y
compris par l'action violente, sont invités à participer à des réunions
organisées par d'importants organismes du Saint-Siège et l'un de leurs leaders
est reçu par le Souverain Pontife
En ma double qualité de Prince de
la Maison impériale du Brésil et de participant actif à la vie publique de
mon pays, j'ai l'honneur de m'adresser à Votre Sainteté pour Lui faire part
d'une grave préoccupation concernant la cause catholique au Brésil, et en
Amérique du Sud en général.
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Les Brésiliens le savent bien,
c'est sur les instances du Pape Léon XIII, et malgré le préjudice politique facilement
prévisible qui en résulterait, que mon arrière-grand-mère, la Princesse
Isabelle, régente de l'Empire, signa le 13 mai 1888 la Lei Àureal , abolissant
définitivement l'esclavage au Brésil. Cela lui coûta son trône, mais lui valut
de passer à l'Histoire comme La Rédemptrice, et de recevoir des mains
du Pape la Rose d'or en récompense de son abnégation en faveur de l'harmonie
sociale et des droits des plus faibles.
Mû par le même sens de la justice et du dévouement de
mes ancêtres au service du bien commun, je
m'honore d'être à l'origine et d'animer depuis dix ans
l'initiative Paz no Campo [Paix dans la campagne, qui promeut l'harmonie
sociale dans le secteur agricole brésilien. Tâche d'autant plus impérieuse
que, depuis quelques dizaines d'années, les zones rurales du pays sont
notoirement troublées par des occupations d'exploitations agricoles,
d'agressions, de destructions de plantations, d'expropriations confiscatoires,
d'exigences environnementales déraisonnables, le tout dans un contexte
d'insécurité juridique.
Au coeur de cette agitation agricole — principale
entrave au plein développement de l'agriculture et de l'élevage brésiliens,
garants de 37 % des emplois au Brésil' et près de la moitié des emplois créés au
premier semestre 20134— se trouvent le Mouvement des paysans
sans-terre, connu sous son sigle de MST, et l'organisation internationale La
Via Campesina [La Voie paysanne]5.
[1] Un dirigeant national du MST profite du séminaire
convoqué par un organisme du Saint-Siège comme tribune pour promouvoir la lutte
des classes
C'est donc avec consternation que
j'ai pris connaissance de l'invitation envoyée par l'Académie pontificale des
Sciences à M. Joâo Pedro Stédile, coordinateur national du MST et représentant
de La Via Campesina, à participer en observateur au séminaire organisé
par cette Académie, à Rome, le 5 décembre 2013, sur « L'Émergence des personnes
socialement exclues », ses dépenses de voyage étant payées par le Vatican, selon
les déclarations du bénéficiaire lui-même.
Cette consternation s'est
diffusée dans les milieux catholiques les plus divers car, comme il était
facile de le prévoir, le fameux agitateur du MST profita de l'événement comme
tribune pour promouvoir, une fois de plus, ses principes erronés et ses fausses
solutions, les uns comme les autres basés sur la prémisse marxiste de la lutte
des classes et sur l'utopie d'une société collectiviste.
Deux jours seulement après le
séminaire réalisé dans l'enceinte du Vatican, M. Joâo Pedro Stédile fit en
effet une conférence aux militants de l'ultra-gauche altermondialiste d'Italie,
dans un ancien théâtre de Rome
occupé par eux. Dans sa présentation, reproduite par
l'Agence d'informations Adista6 , il a fait l'apologie de ses
méthodes illégales. Selon ce qu'il y a dit, « la route des changements par
la voie institutionnelle paraît bloquée de façon décisive »; et il s'est
vanté de ce que « tout ce que le MST a conquis au cours de ses trente ans de
vie provient de la pratique des occupations de masse » de domaines
agricoles, c'est-à-dire la violation systématique de la propriété privée en
milieu rural.
La nécessité de ce recours à
l'illégalité et même la violence de la part du MST résulterait, selon Stédile,
du « contexte historique actuel, [où] le rapport de forces au niveau
de la lutte des classes est assez défavorable aux classes ouvrières » — c'est-à-dire
aux forces de gauche qui usurpent la représentativité des ouvriers.
Stédile admet même que « le
monde vit une période de reflux du mouvement de masse » qui affecte
jusqu'au MST car « les conditions de lutte de classes sont plus difficiles :
les masses ressentent l'impossibilité d'une victoire, et font machine arrière
».
1. NdT.
Littéralement : la Loi d'or.
2. L'initiative
Paz no Campo est connue au Brésil pour défendre les principes de la
propriété privée et de la libre initiative, selon les enseignements contenus
dans les documents du Magistère traditionnel de l'Église.
3. http://www.feedfood.com.briagronegocio-corresponde-37-dos-empregos-gerados-no-pais/
5. NdT.
Sur José Bové, leader de La Via Campesina : http://www.viacampesina.org/
fr/index.php/actions-et-nements-mainmenu-26/10-ans-domc-ca-suffit-mainmenu35/41-le-leader-de-la-via-campesina-josovib-suite-e-fortes-protestations
6. htlp://www.adistaonlineitnop=articolo&id=53494
[2] « Le tournant de la lutte des
classes sera mondial... et la terre tremblera »
Mais il affirme que ce manque de
soutien populaire ne doit pas décourager les forces de gauche. Appelant à « l'école
des marxistes historiques de Grande-Bretagne », le chef des envahisseurs
de terres agricoles espère que l'actuelle période de reflux soit aussi une «période
de résistance... prélude à un processus de reprise ».
Cette période de résistance —
qui, selon lui, pourra durer «plusieurs années » — doit être mise à
profit pour « apprendre les leçons de la lutte des classes au fil du temps
». Et le MST doit en profiter pour sa «formation politique », remettant
en valeur et « étudiant Marx, Lénine, Gramsci', mais aussi les Brésiliens Paulo Freire, Josué de Castro
et tant d'autres », dit Stédile à ses auditeurs altermondialistes italiens.
Permettez-moi, Saint-Père, de
relever la menace par laquelle Stédile a conclu sa harangue : il a insisté sur
la nécessité pour « la classe ouvrière de se réunir au niveau international
», mais aussi en dehors des ONG et des Forums sociaux mondiaux — puisque
ceux-ci auraient échoué dans leur mission d' « organiser le peuple » — et
il a indiqué qu'il faut maintenant réunir « tous les mouvements sociaux du
monde » dans un « autre espace » de confrontation face au capital
financier et international. De cette façon, a-t-il conclu, « le tournant
de la lutte des classes sera mondial et, enfin, quand la phase
d'ascension aura commencé, cela se fera de tous côtés. Et la terre tremblera
».
[3 ] Stédile se vante d'avoir reçu le
soutien du Vatican et Leonardo Boff s'en félicite
Pour le moment la terre ne
tremble pas. Mais je ne peux m'empêcher de me demander, Saint-Père, pour quelle
raison l'Académie pontificale des Sciences a-t-elle invité ce paladin d'une
utopie révolutionnaire si viscéralement antichrétienne et ce promoteur de la
violation systématique des lois. Les classes populaires étant de plus en plus
réfractaires à la prédication révolutionnaire, il est en effet évident que le
leader du MST et l'ensemble de ses camarades révolutionnaires ne peuvent
qu'avoir l'ambition d'instrumentaliser l'Église catholique et certains
organismes du Saint-Siège comme compagnons de route dans cette utopique
aventure (d'où l'appel à étudier Gramsci, le grand idéologue de cette
stratégie).
C'est ce qu'admet J. P. Stédile lui-même dans une entrevue'
donnée à la presse aussitôt après sa conférence au Théâtre Valle Occupato, se
vantant d'avoir réussi à « motiver le Vatican à nous aider, ainsi que La Via
Campesina, en tant que mouvements sociaux, pour organiser plusieurs conférences
l'an prochain ».
Il en attend « dorénavant un
plus grand dialogue entre le Vatican et les mouvements sociaux », dont le
résultat serait que « dans nos pays [...] les églises locales écoutent les
peuples au lieu du nonce apostolique, un bureaucrate au service de je ne
sais qui ». Voilà com
ment il rétribue le Vatican de l'invitation et du
billet d'avion qu'il a reçus de lui, selon ses propres dires...
Si ce n'est les adeptes de la
Théologie de la libération, quels sont les membres de ces « églises locales
» qui devraient mépriser les avis du représentant du Saint-Siège sous le
prétexte d'écouter « les peuples » ?
Fort significatif est le ton euphorique par lequel un
des coryphées les plus en vue de ce courant – l'ex-frère Leonardo Boff – a
commenté l'incursion de M. Stédile au Vatican9.
Boff a manifesté sa joie de voir « les pauvres et
les exclus » – en vérité les leaders d'extrême gauche maintenant « convoqués
à Rome, auprès du Siège Apostolique, pour parler en leur propre nom ». Il
a relevé que « le thème est éloquent : L'émergence des exclus. Voilà
qui nous renvoie à un thème central de la Théologie de la libération quand
elle en était à ses débuts : l'émergence des pauvres ».
D'après l'ex-religieux, le colloque en question peut
signifier « le début d'une nouvelle volonté de réinventer l'Humanité » (sic).
Comme nous voilà proches du mythe de « l'homme nouveau » collectiviste, rêvé
par Marx !
[4] Message d'encouragement à une
organisation internationale
responsable d'actes de vandalisme
Tout ce qui vient d'être exposé, Saint-Père, est de
nature à choquer des millions de catholiques brésiliens au courant du passé de
violence, de crime, de destruction et de misère que le MST et La Via
Campesina ont laissé derrière eux en trente ans d'occupations illégales de
terres et de domination totalitaire sur les militants qu'ils réunissent dans
leurs campements.
Ces Brésiliens seront encore plus
déconcertés en apprenant qu'en plus de l'invitation envoyée à Joâo Pedro
Stédile pour participer au séminaire de l'Académie pontificale des Sciences,
mentionné plus haut, Votre Sainteté a enregistré sur vidéo, à cette occasion,
un message de salutations adressé aux participants de La Via Campesina.
7.
Ici et dans la suite du texte, les passages les plus significatifs de
quelques 9. hilp://leonardoboff.wordpress.com/2014/01/10/os-movimentos-populares-latino‑
citations sont soulignés en
caractères gras. americanos-junto-ao-papa-francisco/
Votre Sainteté peut calculer
combien les millions de téléspectateurs effrayés par les sanglots inconsolables
de la scientifique, trouveront invraisemblable qu'Elle ait stimulé La Via
Campesina à « aller de l'avant » précisément ce que la scientifique ne
peut plus faire, c'est-à-dire continuer ses méritoires recherches" !
Ces agissements de La Via
Campesina, Saint-Père, n'ont pas été les seuls. Pour ne pas m'étendre, je
n'en ajouterai qu'un exemple. En juin 2008, des membres de l'organisation ont
détruit le fruit des recherches de la Station expérimentale de canne à
sucre de Carpina, dans la Mata Norte'2, organisme lié à l'Université
fédérale rurale du Pernambouc (UFRPE). Vers quatre heures du matin, deux
centaines de membres de La Via Campesina sont arrivés sur place dans des
autobus et ont neutralisé le veilleur de nuit. En une heure de temps, une
action rapide leur a suffi pour détruire des plantations expérimentales dans
les champs, et des résultats de recherches
du Centre de végétation pour les expérimentations. S'y
trouvaient aussi des études de la Station expérimentale et celles
d'étudiants en maîtrise et en doctorat.
Pour le directeur de l'unité de recherches, Djalma
Eusébio, le préjudice scientifique et technologique est incalculable : « Ils
ont détruit des plantes issues de recherches de plus de dix ans d'amélioration
génétique. Également des études menées depuis deux ans ont été complètement
détruites. Le préjudice est irréparable » a-t-il dit. Les militants ont
pris la fuite avant l'arrivée de la police sur les lieux et ont laissé deux de
leurs drapeaux dans les champs".
Quant aux déprédations commises
par le Mouvement des paysans sans terre, le MST, pendant des occupations
de terre à caractère délictueux, voire criminel, leur relation occuperait un
ouvrage volumineux. J'en épargne l'insipidité à Votre Sainteté.
[5]Comment La Via Campesina interprètera-t-elle
l'encouragement du Pape François à « aller de l'avant » ?
Les membres de
La Via Campesina interprèteront probablement ses encouragements à « aller
de l'avant » d'après leurs actions illégales décrites plus haut. Ce qui les
mettra en net contraste avec les mots catégoriques avec lesquels son prédécesseur,
S. S. Jean Paul II, a condamné à trois reprises entre 1991 et 2002, les occupations
illégales de terres reprenant en cela l'enseignement de Léon XIII.
Et plus particulièrement
l'avertissement de Jean Paul II aux évêques de la région Sud 1 de la Conférence
nationale des évêques du Brésil (CNBB), en visite ad limina apostolorum au
mois de mars 1995, quand il réitéra l'enseignement traditionnel de l'Église : «
Je rappelle, également, les paroles de mon prédécesseur Léon XIII quand il
enseigne qu"enlever de force le
[6]Un leader argentin de « cartoneros » considère
la propriété comme du vol et rêve d'un socialisme fortement planifié
On comprend toutefois que Votre Sainteté n'ait pas eu
connaissance des faits délictueux concernant La Via Campesina au Brésil,
et que les paroles « aller de l'avant » ne signifiaient rien de plus
qu'une clause de style destinée à conclure des salutations.
Mais — qu'il me soit permis de le dire avec tout le
respect — ma perplexité serait plus grande dans l'éventualité où Votre
Sainteté ne saurait pas parfaitement qui est Juan Grabois, argentin militant de
la « gauche populaire » péroniste, également invité par l'Académie pontificale
des Sciences, non seulement comme un des organisateurs du séminaire précité
mais aussi comme premier de ses conférenciers, donc celui qui donnerait le ton
à l'ensemble du colloque.
Coordinateur du réseau des cartoneros
— les ramasseurs de vieux cartons de Buenos Aires — du Mouvement des
Travailleurs Exclus (MTE), et un des fonda
teurs de la Confédération des
travailleurs de l'économie populaire, cet avocat et militant de la gauche
péroniste ne cache pas ses convictions ouvertement marxistes.
Dans un article pour l'
AgendaOculta.net16, Grabois soutient la thèse que l' « accumulation
originelle » de richesse par les classes aisées « provient d'un grand
crime » que « le temps ne lavera jamais ». Pour lui la richesse des
particuliers est nécessairement le fruit « du pillage, de l'esclavage, du
vol, de la contrebande, de l'évasion de capitaux, de trafics [en tous
genres, NdT], de malversations, du non paiement de dettes, de la corruption,
du détournement de fonds publics... ».
Et il ajoute : « Voilà, et
rien d'autre, ce que sont les méthodes qui figurent au menu de tout aprenti-bourgeois
». Il inclut dans cette dernière catégories les travailleurs de l'économie
informelle qui réussissent dans leurs efforts car, selon lui, ils se
transforment ipso facto
12. NdT.
Littéralement : la Forêt Nord.
14. http://www.vatican.vatholy
father/john_paul_ii/speeches/1995Imarch/documents/hf jp-ii spe
19950321_brasile-ad-limina_po.html (seulement disponible en portugais).
15. http://www.vatican.vatholy
father/john_paul_ii/speeches/2002/november/documents/hf
jp-ii_spe_20021126_brazil-sul-iii-iv_po.html (seulement disponible en
portugais)
d'auto exploités en exploiteurs et tissent, eux aussi,
des « systèmes péri-capitalistes d'accumulation basés sur le délit,
l'exploitation, l'esclavage et la violation de tous les droits sociaux » de
leurs collaborateurs et partenaires.
Ce qui veut dire que tout propriétaire individuel
serait un voleur du simple fait d'être riche : la vieille thèse de Marx et
Proudhon. Votre Sainteté notera qu'une simplification aussi grossièrement
unilatérale, une telle haine de classe contre le « bourgeois » et la propriété
privée, la libre initiative et le système salarial, se situe aux antipodes de
la pensée de l'Église, et ne peut que conduire au « socialisme réel ».
C'est précisément le discours de l'idéologue des cartoneros
argentins. « La construction d'une économie populaire solidaire,
austère, non consumériste », présuppose un « cadre stratégique » à caractère
nettement socialiste et étatique : la « société sans exploités
ni exploiteurs » ne pourra se réaliser qu'à travers une économie « socialisée et
planifiée »17, dit-il, ce qui implique « une intervention
très forte de 1 'État »18, «régulant, planifiant, complétant et
finançant les unités populaires de production »19.
En quoi ce modèle se
distingue-t-il d'un retour à la défunte Union soviétique ? Du poison marxiste
enrobé de mélasse humanitaire : voilà ce que sont les idées fondamentales de
cet avocat révolutionnaire. Votre Sainteté a toutefois invité les cartoneros
de Grabois à monter sur la tribune lors du chemin de Croix des Journées
mondiales de la Jeunesse20, à Rio de Janeiro, en plus de gratifier
leur chef d'autres gestes bienveillants comme l'audience qu'Elle lui a accordée21,
deux heures durant, au mois d'août dernier, dans sa résidence de Santa Marta, à
Rome.
Ces gestes de Votre Sainteté présupposeraient-ils un
appui à la ligne tracée par l'idéologue Juan Grabois ? C'est ma filiale et
respectueuse interrogation.
[7] Dans l'enceinte du Vatican résonnent les
élucubrations anticapitalistes de Karl Marx
Naturellement Me J. Grabois s'est
avidement emparé de la tribune inaugurale du séminaire du 5 décembre [2013]
pour appuyer ses analyses sur le marxisme, et « expliquer » au cardinal
Turckson, du Conseil pontifical «Justice et Paix », et aux autres participants
à l'événement, que Marx avait raison et qu'il n'avait seulement pas prévu tous
les développements ruineux du capitalisme !
Je n'abuserai pas du temps de Votre Sainteté en
résumant la conférence de Grabois, intitulée « Capitalisme d'exclusion,
périphéries sociales et mouvements populaires »22. Je souligne
simplement qu'il reprend de vieux clichés marxistes sur le « caractère
structurel de l'exclusion », qui d'après lui « sortent des entrailles du
système économique financier global » comme une « conséquence de
structures humaines injustes ».
Il considère donc nécessaire » d'analyser
le capitalisme dans sa phase actuelle » globalisée, ainsi que « les nouveaux
antagonismes sociaux qu'il engendre ».
Selon l'avocat marxiste, cette question avait déjà été
abordée par Karl Marx dans le chapitre XXIII du Capital. Ce que Marx n'a
pas prévu, dit-il, c'est que ce monde globalisé sécrèterait une partie
croissante de la population qui resterait en dehors du processus de production
formel, constituant la « masse marginale » des « travailleurs exclus
» qui, pour survivre, entreraient dans le secteur informel de l'économie :
ceux-là constituent « le sujet social le plus dynamique de cette étape
historique ». Frei Betto23, cité par Grabois, qualifie les
travailleurs de ce secteur comme « pauvretariat » (sic).
[8] Le MST et La
Via Campesina, paradigmes du nouveau
« pauvretariat » pratiquant l'action directe comme instrument de libération
Ces travailleurs informels
seraient supposément motivés par l'aspiration à « un monde sans exploitation
de l'homme par l'homme, où chacun recevrait selon sa nécessité et contribuerait
selon sa capacité » (principe marxiste bien connu). C'est-à-dire que tous
seraient des communistes en puissance, adeptes complets de l'utopie marxiste,
même sans le savoir ! Saint-Père, que cette contre-vérité hurlante — qui prêterait
à rire si elle n'était aussi terrible — ait été prêchée dans les enceintes du
Siège apostolique, c'est ce qu'on n'arrive pas à comprendre...
Toujours dans sa conférence
introductive au colloque, Grabois reprend à son compte la vieille dualité
marxiste oppresseur-opprimé, pour dire qu'émerge aujourd'hui un nouveau
prolétariat prêt à se rebeller, constitué par les « va-nu-pieds du XXle
siècle, chômeurs, ramasseurs de vieux cartons, indigènes, paysans
sans terre, immigrés, vendeurs à la sauvette,
sans-logis, sans-travail, sans-papiers ».
Selon Grabois, ce « pauvretariat » se présente
avec de nouvelles formes d'organisation et de nouveaux moyens d'action, parmi
lesquels il souligne « différentes formes d'action directe », euphémisme
forgé par les anarcho-syndicalistes français du début du XXe s. pour désigner
l'illégalité et la violence. Cette stratégie d' « action directe » serait
nécessaire de nos jours parce que, contrairement aux ouvriers de l'industrie
qui « comptent sur la grève comme principal instrument, les exclus ne
peuvent se faire entendre qu 'au moyen d'attroupements, de mobilisations et
d'autres formes de lutte habituellement réprimées par la loi ».
L'activiste cartonero mentionne précisément
comme paradigmes de cette « action directe » les mou‑
cartoneros-argentinos-entre-un-millon-de-peregrinos.html
23. NdT.
Sur Frei Betto voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Frei_Betto
vements invités par l'Académie
pontificale des Sciences pour participer au séminaire qu'elle avait organisé :
le Mouvement des Travailleurs Exclus (MTE) en Argentine (représenté par
lui-même, Juan Grabois), et le Mou‑
vement des paysans sans-terre (MST) du Brésil (représenté par
M. J. P. Stédile), «partie intégrante de La Via Campesina, qui compte plus
de cent organisations dans le monde » et dont le siège central est en
Indonésie.
[9] Apologie d'une nouvelle société collectiviste et
egalitaire
L'agressive exposition de M. Grabois stupéfie surtout
par un point d'insistance particulier : dans l'économie informelle populaire
actuelle, affirme-t-il, bien que « les moyens de production nécessaires
soient à la portée des couches populaires », ils ne sont pas « exploités
collectivement » et ne génèrent pas des « relations sociales
horizontales » — comme il se devrait.
Il faut donc que l'économie informelle soit aussi
contrôlée par le « pouvoir populaire » — autrement dit par de nouveaux
soviets. De là naîtrait « une nouvelle société » qui, cela transparaît
avec suffisamment de clarté, s'identifie avec le communisme le plus achevé.
Sans compter que, si le modèle de cette « nouvelle
société » est celui des « assentamentos »24 de la
réforme agraire contrôlés par le
MST, on ne peut oublier que Miguel Stédile (fils de J. P. Stédile), membre de
la coordination nationale du mouvement, a déclaré à la revue Época (n°
268, juillet 2003) : «Nous voulons la socialisation des moyens de
production. Nous adapterons au Brésil les expériences cubaine et soviétique
» 25
Saint-Père, mon coeur de catholique et de brésilien
ne réussit pas à s'expliquer comment M. Grabois a pu faire résonner dans les
enceintes sacrées de la Cité du Vatican une telle apologie du communisme — avec
son idéologie fondée sur la négation de la propriété privée et la lutte des
classes — soixante-seize ans après que le Pape Pie XI ait condamné ce système
anti-naturel comme « intrinsèquement pervers »26 !
[10] Stédile et Grabois placent leurs esperances non
seulement dans l'Académie pontificale des Sciences mais aussi dans le Conseil
pontifical « Justice et Paix »
Une cause supplémentaire de perplexité vient du fait
que l'avocat ayant prononcé un semblable discours ait été invité le jour
suivant, par Votre Sainteté, pour une audience privée. Et qu'au cours de cette
audience, ait été enregistré le message à La Via Campesina mentionné
plus haut, à quoi s'est ajouté un autre vidéo encourageant le Mouvement de
travailleurs exclus, fondé et animé par ce même militant néo-marxiste
convaincu.
On comprend donc que La Via
Campesina, le MST et le MTE se soient empressés de tout faire connaître
comme « un événement sans précédent », dans un communiqué
conjoint" amplement diffusé dans les médias et où il est relevé que l' « l'activité
fut organisée par le recteur de l'Académie, Mgr Marcelo Sanchez Sorondo, à la
demande du Pape François »
Le communiqué souligne qu' « au
terme de la journée, Stédile et Grabois poursuivirent par une longue réunion
avec le cardinal Turkson, président du Conseil pontifical [I] justice et [P]
aix, où ils échangèrent leurs opinions sur différentes questions sociales et
discutèrent d'alternatives pour poursuivre le dialogue entre l'Église
catholique et les mouvements populaires ».
De ces rencontres avec des
prélats de la Curie romaine, le MST et le MTE comptent bien tirer de multipes
avantages. Grabois lui-même a affirmé, dans une entrevue à Radio Vaticann: «
Nous devons globaliser la lutte (..). Et je crois que dans ces conditions, même
le Conseil 'Justice et Paix, avec quelqu'un comme [le cardinal] Turkson, va
nous y aider ». Il a également dit qu'il croyait que, « bien que cela
puisse paraître un peu étrange », l'Académie pontificale des Sciences « est
aussi disposée à suivre de près, en ce qui la concerne,
les revendications, nos positions, nos luttes, et même
à renforcer les processus d'organisation. Toujours dans une ambiance de
dialogue, de paix, de convivialité, de respect pour les institutions ».
Quant aux promesses de paix et
de respect envers les institutions, au moins pour ce qui touche le MST, je me
sens dans le droit de les qualifier d'habile dissimulation pour mieux
recueillir l'appui du Saint-Siège.
Si l'Académie pontificale des
Sciences s'est réellement engagée à apporter sa contribution pour renforcer
les processus d'organisation de ces soi-disant « mouvements sociaux », comme
l'affirment ces leaders du MST et du MTE, il n'est cependant pas étonnant de
voir leur communiqué commun affirmer que les deux mouvements partagent le « sentiment
renouvelé » d'avoir reçu « un important appui dans leur lutte », et
que « s 'ouvrait désormais une nouvelle étape dans l'unité globale du camp
populaire ». C'est un cri du coeur : cette fois-ci, ça y est, nous
réaliserons l'appel de Marx et Engels : «Prolétaires de tous les pays,
unissez-vous !»
Cette « nouvelle étape » ne présagerait
certainement rien de bon pour l'Etat de droit et le régime démocratique de
nos pays. Car selon le même communiqué commun du MST et du MTE, « la
démocratie formelle ou bourgeoise a failli. Les formes de représentation sont
en crise et ne répondent plus aux intérêts des peuples. [..] Il y a un besoin
urgent de développer de nouvelles formes de participation populaire parmi ces
trois pouvoirs [exécutif, législatif et judiciaire] et de nouvelles
formes de représentation politique partout dans le monde pour réaliser une
démocratie qui en plus d'être formelle, sera réelle ».
24. NdT.
Zones d'exploitation collective — sur le modèle des kolkhozes russes organisés
par l'Institut national pour la réforme agraire sur les terres expropriées.
26. Lettre
Encyclique Divini Redemptofis, du
19 mars 1937, § 58 — http:llwww.
vatican.va/holy_father/pius2d/encydicals/documents/hf_p-xi_enc
19031937_divini-redemptoris_fr.html
En d'autres termes, le tandem
MST — MTE propose le style de « démocratie populaire » en vigueur à Cuba ou
dans le Vénézuéla tyrannisé par les chavistes. Donc une dictature de fait, et
d'autant plus dangereuse que
ces deux « mouvements sociaux » aspirent à
bâillonner la presse libre : « La construction d'une démocratie requiert en
premier lieu [la démocratisation] des moyens de communication ».
[11]
u'où vient l'espérance de ces extrémistes de gauche pour compter sur l'appui
d'organismes du Saint-Siège ?
Je ne peux m'empêcher de m'interroger, Saint-Père,
avec une profonde appréhension et même avec angoisse : d'où vient à ces
extrémistes de gauche l'espérance de pouvoir compter sur l'appui d'organismes
du Saint-Siège pour mener à bien leurs plans révolutionnaires et dictatoriaux
?
Ils semblent convaincus que le Saint-Siège a fait un
revirement doctrinal. Un indice en est que le communiqué MST — MTE enregistre
le fait que « tous les participants firent référence à de nombreuses reprises
à l'Exhortation apostolique Evangelii Gaudium comme comportant des catégories
et des concepts éclairants sur la situation des exclus et la matrice excluante
de l'économie globale ».
Un autre indice en est que Radio
Vatican, dans une émission du 22 janvier dernier, s'est associée aux com
mémorations des trente ans de la
fondation du MST". Et qu'elle a pour cela mis ses micros à la disposition
du P. Savio Corinaldesi, Missionnaire de St-François Xavier, pour lequel le MST
représente « une lumière ». Ce prêtre, recourrant à des expressions d'un
radicalisme hors du commun, en vient à dire que le MST est « haï, exécré
et combattu par ceux qui haïssent, exècrent et combattent le peuple ». Puis,
aussitôt après, convoque le peuple à s'organiser : «Mais, encore
aujourd'hui, il y a un message que nous devons tous écouter et mettre en
pratique : le peuple sait résoudre ses problèmes, et il le fait quand il
s'organise ».
Comment ne pas voir, dans cette ahurissante transmission
de Radio Vatican, une triste et blâmable séquelle de ce qui s'est passé
à l'Académie pontificale des Sciences ?
[12] La question sociale n'est pas simplement économique
mais avant tout morale et religieuse
Pour éviter toute équivoque, je tiens à rassurer Votre Sainteté sur le
fait que je n'attribue aucun caractère de panacée économique à l'actuel
hyper-capitalisme globalisé et qu'en tant que catholique, je déplore, entre
autres défauts graves de l'économie mondiale contemporaine, le fait que de
nombreux secteurs sociaux n'aient pu jouir des bénéfices élémentaires du
progrès matériel. Mais la question est loin de se réduire au domaine
économique.
Léon XIII a enseigné que la dite
« question sociale » est principalement une question d'ordre moral et
religieux. Le Pontife a affirmé : « Certains hommes, en effet, professent
l'opinion, et elle se répand parmi le peuple, que la question sociale ; comme
on dit, n'est qu'une question 'conomique'. Il est très vrai, au contraire,
qu'elle est avant tout une question morale et religieuse, et que, pour ce même
motif il faut surtout la résoudre d'après les règles de la morale et le
jugement de la religion »".
Pour être couronnée de succès, une intervention de la
Hiérarchie ecclésiastique dans le domaine économique et social devrait ainsi
partir de la dénonciation
[13] Restauration de la civilisation chrétienne
La société actuelle,
d'inspiration laïciste, méprise les biens de l'âme. Cette inspiration laïciste
a pénétré l'Occident comme un poison à partir du rejet de l'ordre austère et
sacral qui, était en vigueur dans la Chrétienté lorsque, selon les paroles
lumineuses de Léon XIII, « la
philosophie de l'Évangile gouvernait les États. À
cette époque, l'influence de la sagesse chrétienne et sa divine vertu
pénétraient les lois, les institutions, les moeurs des peuples, tous les rangs
et tous les rapports de la société civile »".
29. http://it.radiovaticana.va/news/2014/01/22/brasile:_compie_30_anniil_
movimento_%E2%80%9Csem_terra%E2%80%9D/it1-766279
30. Encyclique
Graves de communi, du 18janvier 1901 — http://www.vatican.va/
holy_father/leo_xiii/encyclicals/documents/hf kdii_enc_18011901_graves-decommuni-re_fr.html
31. Cf.
Plinio Conta de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, 'ère Partie,
chap. VII, 3.
32. Le
Cardinal a dit : « L'on est en train de mettre sur pied une dictature du relati‑
visme
qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime
uniquement son propre ego et ses désirs » (Sermon de la Messe Pro Eligendo
Romano Pontifice, 18/4/2005 — http://www.vatican.va/gpll/documents/homily-proeligendo-pontifice_20050418
Jr.html
33. Encyclique
Immortale Dei, du 1er novembre 1885 — http://www.vatican.va/holy_
father/leo xiii/encyclicals/documents/hf I-xiii_enc_01111885immortale-dei_fr.html
Conformément aussi aux
enseignements de Saint Pie X, un véritable retour à l'ordre dans la société
humaine suppose donc de restaurer toutes choses dans le Christ — la belle
devise de son pontificat : Instaurare omnia in Christo (Ef. 1,10) — et
de renouer avec l'idéal chrétien de société, qu'il énonça magistralement. Face
à l' « anarchie sociale et intellectuelle » qui se propageait au début
du XXème siècle, le saint pontife désignait la véritable solution : « On ne
bâtira pas la cité autrement que Dieu ne l'a bâtie ; on n'édifiera pas la
société, si l'Église n'en jette les bases et n'en dirige les travaux ; non, la
civilisation n'est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées.
Elle a été, elle est; c'est la civilisation chrétienne, c'est la cité
catholique. Il ne s'agit que de l'instaurer et la restaurer sans cesse sur ses
fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de
l'utopie malsaine, de la révolte et de l'impiété »m.
En ce qui concerne le relèvement
et la régénération des classes ouvrières, Saint Pie X soutenait déjà que «les
principes de la doctrine catholique sont fixés » et, citant Léon XIII,
soulignait la nécessité de « maintenir la diversité des classes, qui
est assurément le propre de la cité bien constituée, et vouloir pour la société
humaine la forme et le caractère que Dieu, son auteur, lui a imprimés »".
En même temps ce grand pontife dénonçait la perversité
qu'il y a à « poursuivre la suppression et le nivellement des classes » sociales
— comme le font le MST et le MTE — et à substituer les bases naturelles et
traditionnelles de la société humaine par la promesse d' «une cité future
édifiée sur d'autres principes »36, tout particulièrement ceux de
l'égalitarisme.
[14] Les pauvres
rejettent la prédication révolutionnaire et aspirent à l'ordre véritable
Ce ne sont donc pas les programmes altermondialistes
à caractère « écologique » et néo-marxiste des soi-disant « mouvements
sociaux » qui résoudront la crise économique actuelle et réduiront la pauvreté
dans le monde.
Si le problème est celui de la
solution au problème des exclus, Cuba est précisément l'exemple à éviter à tout
prix, sous peine de transformer le monde entier en une société de miséreux, et,
là oui, bel et bien exclus : exclus du bien-être, exclus de la vie politique,
exclus de la culture, exclus de la liberté de voyager et, par-dessus tout,
exclus de pratiquer sans entraves la religion catholique dans cette île-prison
!
Les pauvres ne veulent pas pour
eux un tel cauchemar. C'est justement pourquoi peu d'entre eux se laissent
enjôler par les rêveries d'un MST ou d'un MTE, dussent ceux-ci revêtir pour
leur prédication révolutionnaire les habits faussement chrétiens d'une
Théologie de la libération à l'orientation clairement marxiste.
Il est significatif qu'en 2009
une enquête de l'institut de sondage Ibopen ait montré que 92% de la population
brésilienne considèrent comme illégales les invasions de terres promues par le
MST ; 72% des personnes interrogées jugent que les pouvoirs publics devraient
utiliser la police pour faire appliquer les ordonnances judiciaires
d'évacuation de campements illégaux. Plus de 70% des sondés jugent que le MST
porte préjudice au développement économique et social, à la création d'emplois
et aux investissements nationaux et étrangers. Plus significatif encore : pour
85% des Brésiliens le droit de propriété privée est essentiel pour le pays,
clair échantillon qui montre que les peuples rejettent le communisme et sa
misère.
Saint-Père, la démagogie de la
gauche peut trouver une résonance dans les rédactions de certains journaux et
télévisions, dans des milieux universitaires, dans la nomenklatura des partis
politiques... et même — il est douloureux de le constater — dans certains
milieux ecclésiastiques ; mais elle ne trompe pas la grande majorité du
peuple, qui s'éloigne d'elle de plus en plus.
[15] Échec
fracassant de la réforme agraire : au lieu d'avantager les pauvres, elle les
pénalise
Preuve en est que, parmi les
revendications les plus constantes des mouvements imbus de ces idées
révolutionnaires, il s'est toujours trouvé l'implantation d'une réforme agraire
radicale prétendant éliminer la grande et la moyenne propriété, pour réduire la
structure rurale d'une nation dans son ensemble à des terres de petite surface
qui, pour la plupart, n'appartiendraient même pas à ceux qui la cultiveraient
car elles seraient aux mains de coopératives fortement étatisées.
Or, malgré la propagande gigantesque faite en sa
faveur et les sommes considérables mises dans cette propagande, la réforme
agraire a échoué au Brésil. La situation économique et sociale dans les «
assentamentos »38 de réforme agraire est si grave que même des
ministres reconnaissent que la grande majorité d'entre eux se sont transformés
en authentiques « bidonvilles ruraux ». Reconnaissance tardive puisque
cette expres
sion avait été estampillée de nombreuses années auparavant
par le Pr. Plinio Corrêa de Oliveira, dans sa lutte incessante pour alerter les
Brésiliens sur l'issue inévitable de cette aventure. Inévitable, en effet, car
tout ce qui contrarie l'ordre naturel finit tôt ou tard en désastre. C'est
pourquoi les Français disent avec raison : Chassez le naturel, il revient au
galop.
Ce n'est donc pas faute
d'avertissement. Depuis le début des années 1950, le Pr. Plinio Corrêa de
Oliveira avait noté que la propagande révolutionnaire soufflait dans le sens de
la réforme agraire, laquelle finit par prendre substance dans des projets
concrets à la fin de ces années-là. C'est pour en bloquer la route qu'il
écrivit et lança, en 1960, avec deux évêques et un économiste co-signataires,
le livre Réforme agraire — Question de conscience, dans lequel il
prophétisa qu'elle était vouée à l'échec. Ce fut la marque initiale
d'une lutte qui comporta la publication de
34. http://jesusmarie.free.friencydique_notre_charge_apostolique.html 37. http://www.estadao.com.brinoticiasinacional,ibopecna-92-condenam-ocupa‑
35. Op.
cit. Encyclique Immortale Dei. coes-do-mst,485449,0.htm
36. Id. 38.
NdT. Voir note 22.
divers livres, manifestes et déclarations, ainsi que des
campagnes publiques de divulgation et de pétitions, pendant les quarante
années suivantes, jusqu'à son décès en 1995.
Des chercheurs et des
professionnels parfaitement compétents réfléchissent aujourd'hui sur l'échec de
la réforme agraire. H y a peu de jours encore, le Pr Zander Navarro, de
l'Université fédérale du Rio Grande do Sul, dans un article publié dans un
grand quotidien du matin à Sâo Paulo,39 décrivant l'exode rural
existant du nord au sud du Brésil, a ainsi écrit : «Et il y a les
'assentados'40, [dont la présence dans les zones rurales] devrait
être significative. En fin de compte, ils devraient représenter un ensemble de
1 250 000 familles sur 8 800 campements, occupant 88 000 000 d'hectares :
presque l'équivalent de la superficie totale de l'État du Mato Grosso. Mais
la réforme agraire est un échec fracassant : une bonne partie
[16] Quo vadis, Domine?
Votre Sainteté définit peu à peu
et avec prudence la direction de son pontificat. H est naturel que les fidèles
suivent avec attention les pas successifs qui la manifestent.
Devant les inévitables perplexités que produit tout
changement de direction, on comprend que nombreux soient ceux qui se posent,
dans l'intimité de leurs coeurs, la question que, selon la légende, Saint
Pierre fit lui-même lorsque, fuyant la persécution de Néron, il rencontra
Jésus-Christ venant en sens contraire : Quo vadis, Domine ? — Où
allez-Vous, Seigneur ?
A la réponse de Notre Seigneur
lui disant qu'Il se dirigeait vers Rome pour y être crucifié à nouveau, Saint
Pierre comprit que le moment était venu de souffrir à son tour le martyre. Et
c'est avec une grande humilité qu'il se soumit au supplice, demandant à ses
bourreaux de le crucifier la tête en bas — selon la pieuse tradition — parce
qu'il se considérait indigne de subir une mort égale en tout à celle de son
Maître.
Devant les faits détaillés plus haut et les perplexités
qu'ils entraînent, un fidèle pourrait être amené à adresser à Votre Sainteté
une semblable question — Quo vadis, Domine?
Serait-ce légitime ? Et dans quelles conditions ?
Le Code de droit canonique
consacre dans son canon 212 § 345, le plein droit de tout fidèle à
exposer respectueusement son opinion, dans cette matière ou dans d'autres : «Selon
le savoir, la compétence et le prestige dont ils jouissent, ils [tous les
fidèles] ont le droit et même parfois le devoir de donner aux Pasteurs
sacrés leur opinion sur ce qui touche le bien de 1 'Église et de la faire
connaître aux autres fidèles, restant sauves l'intégrité de la foi et des moeurs
et
39. Journal 0 Estado de Sâo
Paulo, 22 janvier 2014.
40. NdT.
Les paysans installés dans les « assentamentos » de réforme agraire.
41. Evaristo
Eduardo de Miranda, Docteur en Écologie, responsable du secteur de contrôle par
satellite de l'Embrapa.
43. Noticias
Agroinwesti, 17 juin 2011, Cleber Bordignon : Agronegôcio, um mundo de
oportunidades (« L'agro-industrie, un monde d'opportunités ») http://www. agroinwesti.com.brnmenu=noticias&id=907
44. Noticias
CNA, 2 novembre 2011, Brasil e EUA: grandes potências para alimentar o mundo
(« Le Brésil et les États-Unis : grandes puissances pour alimenter la
population mondiale ») —
des bénéficiaires ont renoncé, laissant les `assentamentos'
raréfiés, spécialement dans la zone qui s'étend du centre du pays vers le haut,
surtout au Nord-Est et au Nord ».
Tandis que les « assentamentos
», établis dans un cadre d'agitation et de réforme agraire, ne produisent rien
et vivent des oboles de l'État, les petits, moyens et grands agriculteurs,
aidés par la technologie, ont une productivité tellement élévée qu'un experte
de l'Institut brésilien de recherche agronomique (Embrapa) peut commenter : «
La production agricole du Brésil alimente 1 milliard de personnes »42. Une autre étude établit que « le
prix du panier de la ménagère a été divisé par deux entre 1975 et 2010 »43,
ce qui explique que, « au cours des années 1970, la famille moyenne au
Brésil dépensait en nourriture près de 40% du revenu familial. Cette valeur
est tombée aujourd'hui à moins de 16% »44.
la révérence due aux pasteurs, et en tenant compte de
l'utilité commune et de la dignité des personnes ».
C'est ce que je souhaite
accomplir dans ce RÉVÉREND ET FILIAL MESSAGE, convaincu que Votre
Sainteté le recevra avec sa paternelle bienveillance comme une contribution
loyale au succès de son éminente mission dans le gouvernement de la Sainte
Église.
* *
*
Réaffirmant mon obéissance sans
restriction et pleine d'amour envers la Sainte Église mais aussi envers le
Pape, dans tous les termes prescrits par la doctrine catholique, je prie Notre
Dame Aparecida, Reine et Patronne du Brésil, d'illuminer Votre Sainteté et
d'aider tous les catholiques latino-américains à rester fortes in fade, dans
leurs convictions catholiques et leur rejet de l'extrémisme de gauche.
Et qu'ainsi cette Terre de la Sainte Croix conjointement
avec les nations soeurs de l'Amérique espagnole continuent à former le
continent de l'Espérance avec les bénédictions de leur chère protectrice, Notre
Dame de Guadalupe.
Embrassant l'anneau du pêcheur, je demande humblement
la bénédiction apostolique,
in Jesu et Maria
Bertrand d'Orléans-Bragance Sâo Paulo, 8 février 2014
Son
Altesse impériale et royale le Prince Bertrand d'Orléans-Bragance descend
des empereurs du Brésil qui sont issus des rois de Portugal.
La dynastie de ceux- ci se confond, depuis le )(Vile
siècle, avec la Maison de Bragance qui remonte à la fin du XIVe et dont la
plus glorieuse figure est le connétable Nunez Alvares Pereira, béatifié par le
Saint-Siège.
La Maison des Orléans-Bragance est issue du mariage du
Comte d'Eu avec la Princesse Isabelle, fille aînée du dernier empereur du
Brésil. Par sa mère la Princesse Marie de Bavière, le Prince Bertrand hérite
des traditions de la Maison royale des Wittelsbach.
Né en 1941 à Mandelieu —Alpes- Maritimes — il rentra au
Brésil à l'âge de quatre ans avec la famille impériale. Fervent catholique, il
est un défenseur actif des valeurs fondamentales de la civilisation chrétienne.
Son père,
le Prince Pierre-Henri d'Orléans-Bragance, était un ami proche du professeur
Plinio Corrêa de Oliveira, fondateur de la TFP, auquel il confia la formation
intellectuelle et politique de ses aînés. Dès sa jeunesse, le Prince Bertrand a
apporté son enthousiasme et sa collaboration à la Société brésilienne de
défense de la Tradition, Famille et Propriété.
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