mercredi 3 avril 2024

Les disciples d'Emmaüs



Les deux amis étaient partis tôt le matin,

Ils cheminaient tristement tout à leurs pensées 

Ils avançaient, et, parfois, s'arrêtaient soudain

Trop émus encore pour la ville quitter


Jérusalem ! Cité sainte qu'ils fuyaient, après 

Le brutal événement de la mort du Christ.

Leur seul maître bien-aimé en qui ils croyaient

Cloué sur le bois de la croix! Leur Jésus Christ!


Ils avancent lentement emplis de questions, 

Ils peinent à quitter la ville où ils ont connu

Tant de ferveur, d'espoir, d'amour, de communion

Avec les Apôtres. Ils fuient vers Emmaüs.


Tout est fini. Il est mort comme le dernier

Des voleurs. Tout est fini, il n'est pas Sauveur

Du peuple élu, la race choisie en premier

Par un Dieu jaloux plein de douceur, de fureur


Il n'est pas le roi d'Israël prophétisé

Par des hordes folles et des siècles d'Histoire

Il n'est qu'une chimère réduite en fumée

Laissant sur tous sidération et désespoir. 


Soudain,  se joint à eux, un homme, un inconnu

Apparu à la croisée des chemins, sans bruit

Présence réelle au sein des esprits confus

Ils regardent, étonnés,  l'inconnu qui sourit.


Les deux amis reprennent la route, suivis

Par l'homme. Les événements de la Passion

Sont relatés. Tant de questions pour les amis

Et patiemment le nouveau venu y répond


Il dresse le portrait infini du Salut

Il raconte son histoire depuis Moïse 

La quête des prophètes au sein du peuple élu

Les disciples émerveillés visualisent


La création du monde par un Dieu d'amour

Le plan divin pour ses créatures chéries

L'alliance parfaite conçue pour toujours

Et ce lien unique par le péché détruit 


Qu'à cela ne tienne! Car Dieu pourvoit à tout 

Il envoie son Fils aimé sauver ses enfants

Et, dans le mystère Trinitaire, se noue

Le sort de l'univers, son renouvellement 


Tout est pensé, pesé au coeur de l'Esprit Saint

Tout est décidé, proposé par Dieu le Père 

Tout est accepté, voulu par le Fils, si bien

Que le Sacrifice de la Croix est offert


Les deux disciples écoutent l'homme parler

Ils restent sans voix devant ce tableau précis 

L'instant vécu emplit leur coeur d'éternité 

Ils contemplent sans voir leur Dieu grâce à l'Esprit


L'alliance perdue depuis la nuit des temps

Se reconstitue alors et brûle en leur coeur :

Le lien sacré brille au fond des âmes à l'instant

Timide étincelle qui surgit de ce malheur


Mais déjà le soir approche et le jour baisse

Les disciples retiennent leur nouvel Ami

A la table, Il consacre les Saintes Espèces 

Le pain et le vin devant eux dressés, bénis


Leurs yeux s'ouvrent enfin, leur esprit s'éclaire

Et ils reconnaissent leur Seigneur crucifié 

Leurs coeurs brûlants avaient compris le mystère 

D'un Dieu, pour les hommes, mort et ressuscité 


Leurs coeurs brûlants avaient reconnu le Messie

Les Ecritures ne les ont jamais trompés

La mort est vaincue, l'homme et son Dieu réunis

 La rédemption acquise pour l'éternité. 







dimanche 31 mars 2024

Au tombeau





 



En levant les yeux, alors que la nuit venait,
La lune ronde et pleine, immobile, levait.
L'astre des ténèbres, plus brillant que jamais
On était vendredi Saint, le Christ nous quittait.

Roule, tourne la lune,
Pleure et brille le disque
Contemple dans la brume
La pure Hostie qui surgit.

Il s'en allait seul dans le noir, sa lumière
S'avançait, rassurante, fixe et joyeuse,
S'en allait au tombeau, sa maison dernière
Et roule la pierre toute lumineuse.

Roule, tourne la lune,
Pleurent tous devant le Fils
Contemplent dans la brume
Le Corps qui, au tombeau, gît.

Les femmes attendaient agenouillées au tombeau
Priaient, pleuraient leur Dieu mort parti aux enfers,
Mais le rocher s'illumine comme un flambeau
Le Seigneur se tient, les ténèbres l'éclairent.

Roule, tourne la lune,
Ils prient l'Agnus Dei
Contemplent dans la brume
La grande porte qui luit.

En levant les yeux, alors que le jour venait
La lune s'est effacée, la pierre a roulé
Le Ciel s'est ouvert, le paradis, son entrée,
Le soleil et sa grâce, Christ ressuscité.

Roule, tourne la lune,
Adorent l'astre glorieux
Contemplent dans la brume
Le Seigneur victorieux.

Souvenir pascal (2)

 

Souvenir pascal

Le feu flamboyait devant le petit visage rond
"Joyeuse Lumière, splendeur éternelle du Père"
Dans la nuit obscure, la fin des doutes, des raisons
La main blottie dans celle, toute rêche, de la mère
Oh fêtes de l'enfance, essence de la religion.

Se souvenir alors, plus tard, quand la vie te blesse
Du feu pascal, du vent de la nuit, des tendres caresses
Se réchauffer à la chaleur des châles que ta mère
Serrait contre toi, et guérir par toutes les prières
Entendues, récitées autrefois. Dieu est là! Au creux
De tout ton esprit, de tout ton corps et de tout ton cœur,
Dieu est là qui t’apaise, qui murmure, qui effleure
Toute ta misère, tes doutes, ta grande douleur.




 

"Je veux être avec toi.
Tu ne peux pas.
S'il te plaît.
Tu ne peux pas. Il faut que tu portes le feu.
Je ne sais pas comment faire.
Si tu sais.
Il existe pour de vrai ? Le feu ?
Oui, pour de vrai.
Où est-il ? Je ne sais pas où il est.
Si, tu le sais. Il est au fond de toi. Il y a toujours été. Je le vois."

(La Route de Cormac McCarthy) 

vendredi 29 mars 2024

Mon Dieu se meurt





A l'aube, ciel lumineux et jardin en fleur
Aux jaunes jonquilles dans la rosée froide;
Le soleil peine à chauffer la terre, son cœur,
Un vent effleure quelques oiseaux bien roides.

Et pourtant! Aujourd'hui! A l'instant! Mon Dieu meurt!
Aujourd'hui! A l'instant! En Croix! A quinze heures!
Le Dieu infini, Tout-Puissant, le Créateur!
Il disparaît, maintenant, Il n'est plus, Il meurt!

Des cris, un rire perlé, un enfant pleure,
La journée s'écoule comme si de rien n'était
Sans que le ciel s'effondre, sans un bruit, sans heurt;
Et la Terre, et les mers, ont un rythme parfait.

J'avance seule, dans mon chemin bien réglé,
Il avance vers le Calvaire, tout souffrant;
Je prends dans mes bras le petit à consoler,
Il prend sur ses épaules le poids écrasant.

Je rentre en ma demeure avec des soucis
Il monte sur la Croix, avec les clous fixés;
Et je m'agite, et je travaille, et je m'ennuie,
Il n'est que douleur, mon Seigneur abandonné.

Et Il meurt sur son bois, Il ne ressemble à rien,
Ce Dieu Tout-Puissant qui prend avec et en Lui
(C'est sa ruse d'Amour, son grand secret, sa fin)
Les hommes écrasés de péchés, anéantis.

La Rédemption, pensée depuis la nuit des temps,
Fait mourir un Dieu par amour de tout homme,
Fait mourir un Dieu vidé de son précieux sang,
Salut que la Passion d'un Dieu conditionne.

Ce plan magnifique, cette mort obscure,
Accordée en Esprit au Fils par le Père,
Révélée le long des siècles aux peuples futurs,
Pour guérir du mal, ses lésions mortifères.

Ton Corps brisé, caché, Satan cherchait en vain
Tu étais descendu de la Croix aux enfers
Tu cachais toute l'humanité en ton sein
Tu libérais des limbes toute la Terre.

Tu nous conduis par ta Passion sur le chemin
De la joie de Pâques, celle du Ressuscité.
Broyés contre ton Coeur, tes enfants chéris, loin
De tout mal, de toute mort, pour l'éternité.

lundi 12 février 2024

M'entends-tu?

 Le roi David, poursuivi par son propre fils 

Absalom, acculé au-delà du Jourdain,

Redoute de se battre, de rendre justice

Contre son propre enfant qu'il aime. Mais en vain.


Le fils, piégé  dans les branches d'un térébinthe,

Meurt de trois coups de javelot plantés au coeur.

Le roi pleure la mort du rebelle en complaintes

Déchirantes. La victoire devient malheur.


Absalom!Absalom! Personne, non, pas même

Dieu ne te sauve alors que tout est oublié

Par le roi ton père : tes péchés et ta haine.

La paix t'est offerte mais tu l'as rejetée.


Entends-tu mon fils, mon premier-né, cette histoire

Qui me fait pleurer? Car cela fait bien longtemps

Que tout est pardonné; qu'il te suffit de croire

Que tu es entre les mains d'un Dieu très aimant


Pour sauver ta vie, tout le bonheur qui t'attend.













samedi 3 février 2024

A propos de Tolkien

 https://youtu.be/sf1GsXKRbEc?feature=shared


Cet entretien magnifique de David Engels (auteur, entre autres de "Que faire?") sur l'auteur du Seigneur des Anneaux.

vendredi 2 février 2024

Syméon

"...  mes yeux ont vu le salut que tu prépares à la face des peuples."


Joseph et la Vierge marchaient dans les ruelles,

L'Enfant-Dieu dans les bras de Marie, souriant.

Ils venaient accomplir, la loi, le rituel

Des juifs, quarante jours après l'avènement.


Joseph avise deux petites colombelles

Sur l'étal bien garni d'un marchand du temple

Petites sacrifiées à la règle usuelle

Marie et l'Enfant les regardent tristement.


Et, devant le temple, au sortir de la venelle,

La famille s'arrête, admire et contemple

Le lieu sacré où se joignent la terre et le Ciel

Ils cherchent l'entrée et se mêlent aux tout-venants.


Syméon, devant son repas habituel

De pain et d'eau, suspend ses gestes brusquement : 

Un poids soudain comprime sa poitrine vieille

Où son coeur fatigué bat trop rapidement.


Il perçoit  dans ce langage confidentiel

L'invitation de Dieu prise il y a longtemps :

Tu viendras me voir dans la foule universelle

Et reconnaître ton Sauveur dans un enfant.


Il se lève vite et, en état démentiel,

Retrouve sa vigueur de jeune homme d'antan : 

Sachant tout au fond de façon spirituelle 

Que voir Dieu c'est mourir, depuis qu'il est enfant.


Il s'élance, hors de lui, entraîné par Ciel,

L'Esprit le conduit vers une Vierge à l'Enfant

Ses yeux fatigués voient le Salut éternel : 

C'est bien Lui celui que j'attendais depuis tout ce temps.


De sa bouche le cantique spirituel,

Jailli d'un coeur empli de l'Esprit-Saint brûlant,

S'élève alors. La prière solennelle

Transperce Marie, au coeur, d'un glaive sanglant.


Il adresse à la Vierge ces mots essentiels :

Le Salut est venu miraculeusement

Jaillissant de ton tabernacle corporel

Apparu au milieu de tous soudainement.


Il s'établit parmi nous ce Dieu éternel, 

Il restaure le genre humain dès à présent 

S'immole comme ces petites colombelles

Tes larmes de mère sont des gouttes de sang


La source vive des deux coeurs sacrificiels

S'entrouvre sur tous les pécheurs et se répand

Elle guérit le mal du péché originel

Rétablit l'alliance de Dieu et ses enfants


Syméon murmure dans un souffle irréel

Sa vision inspirée par le Dieu tout puissant

Marie et Joseph s'imprègnent de la nouvelle

Ils gardent dans leur coeur le secret surprenant.


Ils repartent dans le dédale de ruelles,

Silencieux. Tout est pareil, tout est différent. 

Et, dans le soir qui descend avec le soleil

Le vieillard en paix s'allonge comme un gisant.


Il a vu le Salut pour les peuples fidèles 

Réussit sa rencontre en cet unique instant

Avec son Créateur, le roi de la terre, du ciel,

En chemin désormais vers la croix qui l'attend.