"... mes yeux ont vu le salut que tu prépares à la face des peuples."
Joseph et la Vierge marchaient dans les ruelles,
L'Enfant-Dieu dans les bras de Marie, souriant.
Ils venaient accomplir, la loi, le rituel
Des juifs, quarante jours après l'avènement.
Joseph avise deux petites colombelles
Sur l'étal bien garni d'un marchand du temple
Petites sacrifiées à la règle usuelle
Marie et l'Enfant les regardent tristement.
Et, devant le temple, au sortir de la venelle,
La famille s'arrête, admire et contemple
Le lieu sacré où se joignent la terre et le Ciel
Ils cherchent l'entrée et se mêlent aux tout-venants.
Syméon, devant son repas habituel
De pain et d'eau, suspend ses gestes brusquement :
Un poids soudain comprime sa poitrine vieille
Où son coeur fatigué bat trop rapidement.
Il perçoit dans ce langage confidentiel
L'invitation de Dieu prise il y a longtemps :
Tu viendras me voir dans la foule universelle
Et reconnaître ton Sauveur dans un enfant.
Il se lève vite et, en état démentiel,
Retrouve sa vigueur de jeune homme d'antan :
Sachant tout au fond de façon spirituelle
Que voir Dieu c'est mourir, depuis qu'il est enfant.
Il s'élance, hors de lui, entraîné par Ciel,
L'Esprit le conduit vers une Vierge à l'Enfant
Ses yeux fatigués voient le Salut éternel :
C'est bien Lui celui que j'attendais depuis tout ce temps.
De sa bouche le cantique spirituel,
Jailli d'un coeur empli de l'Esprit-Saint brûlant,
S'élève alors. La prière solennelle
Transperce Marie, au coeur, d'un glaive sanglant.
Il adresse à la Vierge ces mots essentiels :
Le Salut est venu miraculeusement
Jaillissant de ton tabernacle corporel
Apparu au milieu de tous soudainement.
Il s'établit parmi nous ce Dieu éternel,
Il restaure le genre humain dès à présent
S'immole comme ces petites colombelles
Tes larmes de mère sont des gouttes de sang
La source vive des deux coeurs sacrificiels
S'entrouvre sur tous les pécheurs et se répand
Elle guérit le mal du péché originel
Rétablit l'alliance de Dieu et ses enfants
Syméon murmure dans un souffle irréel
Sa vision inspirée par le Dieu tout puissant
Marie et Joseph s'imprègnent de la nouvelle
Ils gardent dans leur coeur le secret surprenant.
Ils repartent dans le dédale de ruelles,
Silencieux. Tout est pareil, tout est différent.
Et, dans le soir qui descend avec le soleil
Le vieillard en paix s'allonge comme un gisant.
Il a vu le Salut pour les peuples fidèles
Réussit sa rencontre en cet unique instant
Avec son Créateur, le roi de la terre, du ciel,
En chemin désormais vers la croix qui l'attend.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire